Mardi 15 octobre, Paul, 27 ans, rentrait chez lui à vélo. Dans le VIIIe arrondissement de Paris, un automobiliste pressé a emprunté la piste cyclable et lui a roulé sur le pied ; sous le choc de la peur et de l’indignation, Paul a tapé sur le capot du véhicule. Le conducteur de 52 ans a ensuite braqué le volant de son SUV vers Paul et l’a écrasé, selon le communiqué du parquet de Paris. Ici, l’aménagement de l’espace public n’est pas le sujet. Tout porte à penser qu’il y a eu intention de tuer, et l’automobiliste a d’ailleurs été placé en examen pour meurtre et écroué. S’agit-il d’un fait divers effroyable mais anecdotique ou bien y a-t-il des leçons à en tirer pour la société ?
Cet homicide a suscité une libération de la parole parmi les personnes qui se déplacent à vélo : les témoignages de violences routières affluent par centaines, comme un #MeToo du vélo. J’ai découvert à cette occasion que mon propre frère était rescapé d’une agression semblable, j’ai lu d’innombrables témoignages glaçants sur les réseaux sociaux, j’ai moi-même eu mon lot d’expériences éprouvantes. Si l’émotion est si forte, si tant d’anonymes s’identifient à Paul, c’est qu’il est beaucoup trop facile pour ceux qui se déplacent à vélo de se représenter la scène, de la rapprocher de leurs propres expériences