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TRIBUNE

Daniel Roche, indocile historien des Lumières et du peuple

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Homme de science et de cœur, l’ancien professeur au Collège de France à l’esprit libre et espiègle est mort le 19 février à 87 ans. L’historien Philippe Minard retrace le parcours de ce savant qui alterna enquêtes novatrices et synthèses percutantes.
Daniel Roche, à Paris, en 2013. (Olivier Roller/Divergence)
par Philippe Minard, Historien, université Paris-8 et EHESS, codirecteur de la «Revue d’histoire moderne et contemporaine»
publié le 22 février 2023 à 5h10

L’historien Daniel Roche, ancien professeur au Collège de France, est décédé à son domicile, paisiblement, dimanche 19 février, dans sa 88e année. Il aura marqué des générations d’historien·ne·s en France, par l’ampleur de son œuvre et la générosité de son écoute, toujours bienveillante. C’était un grand savant, au sens le plus noble du terme, convaincu du pouvoir émancipateur de la culture, mais aussi très sensible à la dureté des inégalités sociales. Un homme de science et de cœur à la fois, toujours attentif aux autres ; et surtout un esprit libre et espiègle, sinon indocile, et d’une extrême probité.

Né à Paris en 1935, Daniel Roche a vu sa famille chahutée par la guerre et ses suites. Pourvu d’un CAP de tourneur-fraiseur (diplôme dont il était très fier), il fut poussé par ses anciens professeurs à poursuivre des études, qui le conduisirent à la Sorbonne, et il entra à l’Ecole normale supérieure de Saint-Cloud en 1956. Magie des Trente Glorieuses, où un CAP d’ouvrier pouvait vous conduire à l’ENS, puis au Collège de France !

Venise, berceau refuge du couple

Agrégé d’histoire en 1960, il épouse Fanette Pézard, future spécialiste du futurisme italien, et professeure d’histoire de l’art. Par son entremise, il nouera une relation particulière avec l’Italie en général, et Venise en particulier, berceau refuge du jeune couple. La complicité entr