Evidemment, c’est plus confortable… et le prétexte est en or. Débattre avec l’extrême droite ? Je ne mange pas de ce pain-là ! Légitimer Le Pen ? Hors de question ! Banaliser Zemmour ? Ne comptez pas sur moi ! Ferrailler sur les plateaux ? Ce n’est pas de mon niveau. Une admirable abstention, en somme, façon Vercors dans le Silence de la mer : on ne parle pas à l’ennemi.
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Est-ce habile ? Est-ce efficace ? Je crains que ce refus drapé dans la rigueur éthique ne cache autre chose. Une pureté hautaine, une crainte de la confrontation, un évitement de l’arène, un retrait sur l’Aventin douillet de l’entre-soi militant. Péguy : «Il a les mains pures mais il n’a pas de mains.» Refuser le débat, c’est plus moral ? C’est plus commode, surtout.
Mutisme de l’autruche
Le boycott, on pouvait le comprendre au début de l’ascension du Front national. On pouvait espérer qu’un refus général maintienne Jean-Marie Le Pen dans la marginalité, parier qu’en parlant tout seul, il resterait solitaire. Mais il est temps de s’en rendre compte : nous ne sommes plus dans les années 80, la France a changé. Désormais, quelles qu’en soient les raisons, plus du quart des Français partagent peu ou prou les idées de l’extrême droite. Bien plus encore, en fait : si l’on cumule les intentions de vote de Le Pen, Zemmour, Dupont-Aignan