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Libération
TRIBUNE

Deux siècles après avoir imposé une dette inique à Haïti, il est temps pour la France de l’indemniser

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Le 17 avril 1825, une ordonnance de Charles X imposait une indemnité démesurée aux Haïtiens en échange de leur indépendance. Alors que la survie de cette nation est aujourd’hui menacée, la France doit créer une commission d’indemnisation et s’acquitter à son tour de sa dette.
Ce qu’il reste de l’ex-fort colonial français Magny, en 2022. La colonie devient un Etat indépendant le 1er janvier 1804 après la révolte de 1791-1804. (Corentin Fohlen/Divergence)
par Sabine Cadeau, historienne à l'université McGill, Michael Kwass, historien à l'université Johns-Hopkins et Mary Lewis, historienne à l'université Harvard
publié le 15 avril 2025 à 6h15

Ce jeudi 17 avril, cela fera 200 ans jour pour jour qu’une ordonnance inique a été signée par Charles X. Par ce document, le roi de France imposait à Haïti le paiement d’une indemnité ruineuse en échange de la reconnaissance de son indépendance.

Nous intervenons aujourd’hui en qualité d’historiens américains à un moment où les valeurs inscrites dans notre propre déclaration d’indépendance sont menacées. La Maison Blanche bafoue les normes constitutionnelles et les principes démocratiques fondamentaux, démantelant des décennies de mesures antidiscriminatoires, expulsant illégalement des immigrants, attaquant les institutions scientifiques et universitaires et tentant d’écraser toute contestation. Il y a cinq ans, le mouvement Black Lives Matter avait mis en pleine lumière la brutalité policière subie par les noirs aux Etats-Unis, suscitant un débat salutaire, tant aux Etats-Unis qu’en France, autour de la question des injustices historiques. Si ces perspectives de progrès aux Etats-Unis se trouvent aujourd’hui freinées par les forces rétrogrades à l’œuvre depuis l’arrivée au pouvoir de la nouvelle administration, il nous semble que la France demeure fidèle à ses traditions humanistes. A l’occasion de ce bicentenaire des torts causés à Haïti, il serait juste qu’elle prenne enfin l’initiative de créer une commission chargée d’examiner la question de l’indemnité et de répondre aux appels à la restitu