L’Argentine constitue un laboratoire privilégié d’expérimentation politique. Si, malgré quatre-vingts ans de vie, le péronisme – cette forme ancienne de populisme – demeure difficile à expliquer, l’émergence d’un populiste libertarien dans la scène politique rend la compréhension de la situation argentine encore plus compliquée.
Avant tout, les arguments explicites qui ont permis la victoire éclatante de Javier Milei (56 %) ce dimanche 19 novembre ne doivent pas éclipser les motivations profondes et implicites de son électorat. Nous sommes certainement face à un vote de contestation viscérale. L’énorme majorité de jeunes qui ont voté pour Milei (69 %) ne connaît pas le fondement de son idéologie. Personne n’a lu Murray Rothbard, le théoricien de l’anarcho-capitalisme et du paléo-libertarianisme dont se réclame le nouveau président.
Si les principaux représentants de l’école autrichienne ont inspiré les prénoms des chiens de Milei («Milton», pour Friedman, «Robert» pour Nozick et «Murray» pour Rothbard), la majorité de l’électorat ignore les thèses de ces économistes. Lorsque Milei fait référence à «l’Etat minimal», les gens ne pensent nullement à la Société du Mont-Pèlerin mais à la confiscation de la Res publica par