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Libération
D'un monde à l'autre

Eté 1945 : «Cette année me rattachait à l’enfance, j’étais encore en sursis», par Michelle Perrot

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Quatre-vingts ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, «Libération» revient sur ce moment charnière (1/5). L’historienne née en 1928 se souvient de la victoire des Alliés, fêtée sur les Grands Boulevards, mais aussi du passage de son bac de français et des mois caniculaires qui ont marqué son entrée dans l’âge adulte.
Michelle Perrot en 1945, à 17 ans. (Studio Pierre Petit/DR)
par Michelle Perrot, historienne
publié le 15 août 2025 à 11h22

Entre juin et septembre 1945, les Français fêtent enfin la paix. Le visage de la France change, tout comme celui du monde avec l’esquisse d’un nouvel ordre mondial. Du bombardement d’Hiroshima à l’indépendance du Vietnam, retour sur un été pas comme les autres avec les historien·nes Michelle Perrot, Bénédicte Vergez-Chaignon et Michael Lucken, l’écrivaine Line Papin et l’ex-secrétaire national du Parti communiste Pierre Laurent.

L’été 45 – celui d’Hiroshima et de la paix – fut pour moi, alors Michelle Roux, celui du bac (première partie). J’avais 17 ans, j’étais en première, pas spécialement en avance, ayant redoublé pour cause de maladie. J’étais une (bonne) élève du cours Bossuet, cours privé religieux, 35 rue de Chabrol (Paris, Xe arrondissement), jouxtant la prison Saint-Lazare, où j’avais fait toute ma scolarité, sous la houlette de la congrégation de la Retraite d’Angers, par convenance personnelle, non par conviction que l’athéisme de mes parents ignorait.

Le bac restait socialement «la barrière et le niveau» qu’avait analysé Goblot, un rite de passage assez élitiste, les études supérieures, l’université, demeurant réservées à une minorité bourgeoise, plutôt masculine, en dépit d’un réel accroissement des effectifs féminins.