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TRIBUNE

Falsification, sélection… Les Russes face au révisionnisme historique de Poutine

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A la veille du défilé militaire du 9 mai à Moscou, censé célébrer la victoire des Alliés sur les nazis, le sociologue Georges Mink décrypte l’impact sur la population des jeux de mémoires instrumentalisés par l’autocrate du Kremlin, entre adhésion et passivité.
Lors d'une répétition du défilé militaire russe du 9 mai à Saint-Pétersbourg, le 7 mai 2025. (Olga Maltseva/AFP)
par Georges Mink, directeur de recherches émérite (ISP-CNRS), professeur au Collège d’Europe (campus de Natolin-Varsovie)
publié le 8 mai 2025 à 16h59

On peut s’interroger sur le rôle et l’efficacité du révisionnisme historique et des jeux de mémoire dans la stratégie de Poutine.

Dans un article de juillet 2021 intitulé «Sur l’unification historique des Russes et des Ukrainiens», on apprend que : «Les Russes, les Ukrainiens et les Biélorusses sont les héritiers de l’ancienne Russie, qui était le plus grand pays d’Europe.»

Mais cette vision est-elle suffisamment convaincante pour unir les Russes autour de l’idée de reconquête ?

De la militarisation de la mémoire collective

Ce qui importe pour gagner l’adhésion de la société, c’est que la mémoire collective des Russes ait déjà été formée en URSS. L’éducation d’un citoyen soviétique incluait une préparation militaire, et la vie se déroulait dans diverses associations militaro patriotiques. Le calendrier était rempli de fêtes militaires ; la commémoration de ceux qui ont combattu pendant la «grande guerre patriotique» était un devoir civique. C’était une sorte de militarisation de la mémoire collective russe.

A la fin des années 1990 du siècle précédent et au début des années 2000, surtout depuis l’annexion de la Cri