Au grand concours de l’émotion portée à incandescence, l’hommage rendu à Charlie Kirk, devant la plupart des télévisions du monde, rivalisait avec les pleurs planétaires versés sur Diana au crépuscule du XXe siècle. A la «Princesse du peuple» a succédé le «Martyr» de «l’Amérique du peuple» aussitôt canonisé par une foule en transes mystico-politiques dans une sorte de tsunami de l’émotion fabriquée en temps réel dans les ateliers du trumpisme.
A presque trente années de distance, avec l’arrivée massive des réseaux sociaux dans nos vies, le poids des algorithmes et de la technique dans notre «domestication», le capitalisme de ce début de siècle a réussi à coloniser la politique en utilisant le cheval de Troie de l’émotion.
En moins de trente ans, l’émotion est devenue idéologie transformant peu à peu la politique en un réceptacle de tous les ressentiments, de toutes les pulsions et de toutes les régressions devenues les outils de tous les populismes d’un côté et de l’autre de l’Atlantique.
Cette forme de tyrannie menace notre idéal démocratique né des Lumières et a engendré une crise de civilisation inédite parce qu’elle rabaisse nos sociétés dans une sorte d’infantilisation, orchestrée par les images, les histoires et les mythes qu’elle produit.
Cet asservissement volontaire auquel nous soumet le capitalisme émotionnel est lourd de menaces sur notre capacité à penser le monde et notre propre condition.
Il nous emprisonne, en effet, dans une conception binaire, irrationn