Partons de deux articles écrits dans la Revue d’Histoire du XIXe siècle en 1928 et 1929, «La préfecture de la Drôme en 1848-1849» et «Epilogue des journées marseillaises de juin», du second surtout. Dans cet article l’auteur s’était plongé dans les archives du procès des 153 émeutiers marseillais de juin 1848, devant le jury de la Drôme en février 1849. L’article s’intéressait moins aux dépositions qu’aux conditions matérielles du procès. Il s’agissait de comprendre par ce biais indirect l’histoire politique d’une petite ville de province, Valence.
Cet article, dont j’ignorais tout – ayant alors un solide mépris de l’histoire du début du XXe siècle que j’imaginais alors «positiviste» –, c’est bien Jacques Rougerie qui me l’avait donné en exemple lors d’une discussion que nous avions, en purs verlainiens, dans un rade du boulevard Saint-Michel, il y a quarante ans, peut-être. Et je crois être près de l’histoire qu’aimait Jacques Rougerie que de commencer ainsi par ces quelques lignes qui peuvent paraître au premier regard lourdes d’érudition critique et loin de nous. Car Jacques Rougerie aimait passionnément le travail fin de l’historien, ce travail qui passe et repasse sur chaque ligne d’un article, d’un témoignage, d’une source. Passionnément historien. Passionnément passant et repassant sur son champ pour en (re)connaître les moindres nuances, le moindre parcellaire. La passion épuise, la passion s’épuise. Et sans nul doute, l’homme avait ses fragilités