Menu
Libération
TRIBUNE

Je me sens aussi juif que palestinien, par Santiago Amigorena

Article réservé aux abonnés
Le massacre perpétré par le Hamas était aussi injustifiable que l’est celui que continue de perpétrer l’armée israélienne aujourd’hui à Gaza. Peut-être faudrait-il partir de cette simple constatation pour réussir de nouveau à se parler : aucun massacre ne justifie un autre massacre.
A gauche : à la Colombia University de New York, le 14 février. A droite : le Congrès sur la Palestine du 12 avril interdit à Berlin. (Andrew Lichtenstein et Sebastian Gollnow via Getty)
par Santiago Amigorena, réalisateur, scénariste, écrivain
publié le 25 avril 2024 à 12h16

Je suis juif. Je suis juif pour les Juifs parce que ma mère est juive, et je suis juif, historiquement si je puis dire, parce qu’une partie de ma famille est morte dans le ghetto de Varsovie ou à Treblinka et une autre dans des pogroms en Ukraine. Je suis juif mais, étant également argentin, français, grec et tant d’autres choses, je ne prends pas souvent la parole en tant que Juif. Aujourd’hui pourtant, je vais essayer de le faire. Je suis juif, et comme tant de Juifs, j’ai mal. J’ai mal pour les centaines de morts et pour les familles et les proches des centaines de morts tués par le Hamas en Israël le 7 octobre.

J’ai mal lorsque je lis ce témoignage à propos du massacre de la rave Supernova : deux amies manquent dans le groupe de Neta Abir-lev, la jeune femme cachée parmi les cadavres avec son compagnon : Linor Kainan et Karine Journo. Le dernier signe de vie de celle-ci, un message envoyé à son père, Doron. «Si je ne reviens pas, sachez que je vous aime», a-t-elle écrit. C’était à 10 heures. Depuis, le silence.

J’ai mal lorsque je lis ces mots comme j’avais mal, quelques jours avant le 7 Octobre, en lisant le témoignage de ce père palestinien : «Là, j’ai vu une mare de sang, le réservoir d’eau fuyait de partout et se mélangeait au sang des enfants. La bombe n’avait pas creusé un grand trou, mais les murs étaient criblés de milli