Le mystère paraît insoluble. Comment le chef de l’Etat et le Premier ministre, garants de l’Etat de droit, ont-ils pu reconduire au ministère de l’Intérieur Bruno Retailleau, un homme partisan de restreindre l’immigration en s’asseyant sur l’Etat de droit ? La question renvoie aux «énigmes en chambre close», ces romans policiers où un crime a été commis dans un lieu réputé inviolable. A première vue, la chambre close en question ressemble à celle des députés. A moins qu’il ne s’agisse d’une prison mentale, celle où les politiques françaises de l’immigration sont enfermées depuis plusieurs décennies.
Pour mener l’enquête, on pourra partir de : «Nous ne pouvons pas héberger toute la misère du monde», trop célèbre phrase émise en 1989 par un autre Premier ministre nommé Michel Rocard, nuancée quatre ans plus tard par : « … mais elle doit savoir en prendre fidèlement sa part. » Même avec ce bémol, la formule cache une bonne dose de roublardise. La France n’a jamais été en situation d’accueillir toute la misère du monde, seulement la petite partie générée par son histoire coloniale et les crises planétaires, et c’est bien cette part que visent les snipers populistes. Depuis lors, près de trente lois ont été impulsées par une longue série de ministres de l’