Notre président de la République ferait un piètre dramaturge. La dissolution de l’Assemblée nationale annoncée hier soir est indéniablement un élément déclencheur, soit un événement qui lance une histoire. Habituellement pourtant, nous, scénaristes, auteurs, dramaturges, faisons en sorte que cet élément déclencheur ait un rapport de sens avec l’histoire. Si le héros est un champion de ski, on va éviter de créer pour lancer le récit une épidémie de peste. Cet élément déclencheur n’aurait aucun rapport de sens avec le héros, et lancerait un récit absurde qui aboutirait probablement à une œuvre indigente. Or hier, mon pays, qui votait pour élire ses députés au Parlement européen, s’est pris un élément déclencheur digne d’une épidémie de peste sur le champion de ski.
Comment peut-on espérer que l’Europe, les enjeux cruciaux pour notre avenir commun qui s’y déploient et les maux fatals, dont bon an mal an elle nous protège, puissent être pris au sérieux si, à peine les résultats d’élections européennes annoncés, notre président de la République nous lance un «puisque c’est comme ça, vous allez voter pour élire vos députés à l’Assemblée nationale »?». Quel rapport de sens sinon celui de nous dire «qu’importe l’Europe, je vous impose le récit qui me convient» ? Quel horizon narratif si