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Le bac philo de Libé: l’union (populaire) fait-elle la force?

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Alerte, voilà le bac philo ! Pour le réviser, «Libé» fait plancher les philosophes sur des sujets revisités. Au tour de Michaël Fœssel d’explorer la question arithmétique : quand un plus un font bien davantage que deux.
L’union du peuple confère une direction à la force des gens, elle évite qu’elle ne se disperse et ne se transforme en une juxtaposition de faiblesses. (David Oliete/www.davidoliete.com)
par Michaël Fœssel, professeur de philosophie à l’Ecole polytechnique
publié le 14 juin 2022 à 16h40

En politique, la force va à la force. Il suffit d’une promesse de victoire pour que des conflits auparavant insurmontables deviennent des malentendus vite dépassés. Récemment, la gauche française apparaissait tellement désunie qu’on la donnait pour morte. Et puis, forte d’un petit miracle (le score de Jean-Luc Mélenchon), elle s’est retrouvée comme un seul homme derrière l’espoir d’une conquête. Mais si la force favorise l’union, l’union fait-elle la force ?

«La populace, disait Victor Hugo, ne fait que des émeutes. Pour faire une révolution, il faut le peuple.» L’union du peuple confère une direction à la force des gens, elle évite qu’elle ne se disperse et ne se transforme en une juxtaposition de faiblesses. Jusqu’ici, la politique est semblable à l’amour : il arrive qu’un plus un fassent davantage que deux. Etre unis, ce n’est pas seulement ajouter ses forces, c’est en découvrir de nouvelles. Le «je» s’étonne que le «nous» puisse réaliser tant de choses : s’embrasser avec fougue durant des heures ou prendre la Bastille. Il suffit parfois d’être ensemble, ou de l’être à nouveau, pour se sentir immortels. Une force qui va en sachant où elle va paraît invincible. Que peut-on contre un peuple uni et déterminé ?

Il y a pourtant des raisons de se méfier du romantisme politique. Il n’es