Et si je n’avais pas compris ? Si j’avais été trop obsédé par le silence de ma mère pour comprendre ? Pour saisir ce qu’était vraiment la Palestine pour elle ? Pour me rendre compte qu’elle en était hantée, dévorée ? Qu’elle était condamnée, comme bien des Palestiniens, à trop souffrir pour parler ?
Je me souviens de ce repas que j’ai partagé avec elle il y a quelques semaines. Je lui ai déclaré que pour moi, ce que montrait le 7 Octobre était qu’il n’y avait plus d’espoir, que seul l’exode était possible puisque rien n’empêchait le gouvernement d’Israël d’agir comme il le désirait, avec l’appui des Etats-Unis et du reste de la communauté internationale. «Voilà plus de cinquante ans, m’a-t-elle répondu, que j’ai quitté ma terre et que j’y suis encore attachée, ce n’est pas toi qui m’empêcheras de la ressentir aujourd’hui. Tu ne sais rien. On a fait croire à ta grand-mère que la Nakba était provisoire, elle est restée des années dans les camps. Les Palestiniens auront leur terre, c’est cet espoir qui nous fait tenir debout, que tu le veuilles ou non.» Elle a eu un rega