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TRIBUNE

Le génocide des Tutsis est aussi l’histoire d’un désastre pour la Ve République, par Olivier Wieviorka

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Génocide des Tutsis au Rwandadossier
Alors qu’Emmanuel Macron vient de reconnaître que la France «aurait pu arrêter le génocide», la lecture du dernier livre de l’historien Vincent Duclert souligne la compromission du pouvoir présidentiel de l’époque, celui de François Mitterrand.
François Mitterrand à son arrivée à Kigali et son homologue rwandais, Juvénal Habyarimana, le 10 décembre 1984. (Georges Gobet/AFP)
par Olivier Wieviorka, Historien
publié le 5 avril 2024 à 17h47

Si le génocide des Tutsis, en 1994, représente un drame pour le peuple rwandais, il constitue aussi un désastre pour la Ve République : la grave implication de la France dans ce drame est indissociable de la compromission du pouvoir présidentiel, celui de François Mitterrand. Telle est, résumée à gros traits, la thèse que défend Vincent Duclert, ancien président de la commission du même nom, dans un livre aussi précis qu’informé (1).

Les faits sont connus. Le 7 avril 1994, des ultra Hutus – l’ethnie dominante dans l’ancienne colonie belge – déclenchent l’extermination des Tutsis dans le sillage de l’attentat ayant coûté la veille la vie au président Habyarimana. Des signes précurseurs annonçaient pourtant la tempête. Après avoir accédé au pouvoir à la faveur d’un coup d’Etat en 1973, le dictateur avait mené une politique hostile à la minorité tutsie, tout en construisant un régime fondé sur la violence, la prédation, la corruption et le racisme.

Acculés, les Tutsis se rebellèrent, entrant en 1990 dans une guerre que conduisait le Front patriotique rwandais (FPR) de