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TRIBUNE

Le monde et ses grands prédateurs: l’ours russe, le dragon chinois et l’aigle américain, par Patrick Sabatier

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Pour Donald Trump, seule la Chine peut à terme s’opposer à la suprématie des Etats-Unis. C’est pourquoi le président américain a besoin de l’appui de la Russie de Poutine pour l’isoler. Quant à l’Europe, désunie et désarmée, elle reste une quantité négligeable.
Exposition «Yalta 2.0», réalisée par de jeunes artistes en référence à la conférence de 1945. Dans une galerie de Yalta (Crimée), en février 2025. (Alexey Pavlishak/REUTERS)
par Patrick Sabatier, agrégé de langue et de civilisation anglaise et américaine, ancien journaliste, ­ex-directeur adjoint de la rédaction de «Libération»
publié le 26 février 2025 à 17h49

Depuis le jour de ma naissance, en 1947, j’ai toujours été fidèle à «l’ami américain». Je n’ai pas oublié la dette dont j’ai hérité envers les boys tombés en 1944 sur les plages de la Normandie pendant «le jour le plus long» pour restaurer la liberté des Français. Je l’ai fréquenté, admiré, imité. J’ai appris sa langue, étudié sa culture et les ai enseignées au lycée. J’ai même passé chez lui plus de six années de ma vie, à Boston à l’université, puis à Washington, comme correspondant de Libé. J’ai parcouru ses terres de l’Atlantique au Pacifique, du Rio Grande au Niagara. Et je lui ai consacré reportages, enquêtes, éditoriaux et deux livres (1).

J’aurai toujours des amis américains, bien sûr. Mais «l’ami américain» a très mal tourné. Il s’est métamorphosé en «ennemi américain». Drogué à la consommation et à la pollution, fanatisé par la foi en un «Dieu qui est à (ses) côtés», corseté par la morale rance héritée de ses ancêtres pèlerins puritains, l’ignorance, l’orgueil et la paranoïa, il s’est retranché, tel un forcené surarmé, derrière les hauts murs de sa propriété privée où règnent la xénophobie et le racisme. Séquestré volontaire dans la Matrix de «faits alternatifs» vendus par les dealers de «réalités virtuelles», il a remis les clés de son royaume à un bouffon populiste malfaisant qui, s’il rappelle le Joker des DC Comics de mon enfance, n’est pas un personnage de BD.

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