Deux années de suite, 1999, l’année de l’Inceste, 2000, celle de Quitter la ville, j’ai été invitée à l’émission de Thierry Ardisson, Tout le monde en parle, sur le service public.
A l’époque, je publie depuis dix ans, mais c’est la première fois que je suis invitée par des animateurs influents comme Pivot et Ardisson. Je me souviens avoir dit à mon éditeur «je suis à la mode ou quoi ?» Ça me faisait peur. Je craignais que ça fasse comme avec mon père que j’ai rencontré à 13 ans, et qui m’a alors reconnue. Il y a eu huit jours merveilleux, j’avais un père, la mention «de père inconnu» était remplacée sur le livret de famille par «née de Pierre Angot». J’étais enfin comme tout le monde, je portais le nom de mon père, il parlait trente langues, et appartenait à un milieu social supérieur à celui de ma mère. Au bout d’une semaine, il s’approche de moi, et m’embrasse sur la bouche. La honte est immédiate.
Tribune
A l’instant où votre père vous embrasse sur la bouche, vous avez honte. Le lendemain, quand vous essayez de le dire à votre mère, et n’y arrivez pas, vous avez honte. De retour à l’école, quand vous dites à votre copine de classe que vous avez passé des vacances extraordinaires avec votre père, vous avez honte. Plus tard, quand des garçons attendent des filles à la sortie de l’école, et que, vous, vous rasez les murs,