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Libération
TRIBUNE

Il faut ouvrir la discussion sur l’armement nucléaire

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Alors que le prix Nobel de la paix vient d’être attribué à une association de victimes du bombardement atomique de Hiroshima, l’historien Renaud Meltz, spécialiste des essais français, demande un débat public sur la politique de dissuasion, encore inédit.
En 2016, à Papeete, manif anti-nucléaire lors de la commémoration du premier essai nucléaire sur l’atoll de Mururoa du 2 juillet 1966. (Gregory Boissy/AFP)
par Renaud Meltz
publié le 15 octobre 2024 à 20h24

L’exposition sur «l’Age atomique. Les artistes à l’épreuve de l’histoire», organisée par le musée d’Art moderne de Paris, interpelle l’historien du nucléaire. Quelle est la place du citoyen face à l’arme atomique ? En 1945, les hommes se sont dotés de la possibilité de mettre un terme à leur propre histoire. Les artistes n’ont cessé, depuis, de rendre sensible l’angoisse suscitée par cette arme.

L’exposition donne à voir une grande absente : la parole du citoyen, confisquée sur le sujet, comme si l’exceptionnel pouvoir de destruction justifiait de restreindre le périmètre de discussion aux arènes politiques les plus étroites, tels les comités de défense. Entre les décideurs qui ont naturalisé l’arme atomique comme un attribut indispensable à l’équilibre stratégique mondial (un équilibre de la terreur), et la capacité d’énonciation et de dénonciation des artistes, quelle place pour la rationalité collective, quelle occasion de délibérer de l’opportunité de détenir la bombe ?

Quelques heures après le vernissage de cette exposition, la reconnaissance offerte par le prix Nobel de la paix à l’organisation des victimes de Hiroshima, Nihon Hidankyo, démontre l’existence d’une parole citoyenne et militante. Cette reconnaissance rappelle l’exigence d’un débat public sur la bombe. Notre dissuasion nucléaire repose sur un double déni démocratique : d’abord par rapport au coût financier, environnemental et sanitaire de l’acquisition de l’arme, ainsi qu’à son opportunité politique, une foi