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TRIBUNE

Les flibustiers: la mer comme butin

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Terres promisesdossier
La mer fut pour ces sillonneurs des océans hors pair du XVIIe siècle un terrain de chasse, une terre de brigandage et, parfois, une clé d’entrée pour «changer de qualité» et intégrer les marines régulières.
Tableau représentant l'attaque et l'incendie par le chef d'une bande de pirates huguenots, Jacques de Sores, surnommé «l'Ange exterminateur», à La Havane (Cuba) en 1555. Avec François de Clerc, ils étaient partis de France en 1553 avec trois navires royaux accompagnés de corsaires commandés par le roi François Ier. (Photo12)
par Frantz Olivié, Editeur et cofondateur des éditions Anacharsis. Auteur de «l’Enfer de la flibuste», avec Raynald Laprise, Anacharsis, 2021.
publié le 12 mai 2022 à 19h40

Habiter la mer

Nous habitons tous quelque part (ou en plusieurs lieux). Comment transformons-nous ces endroits qui nous abritent et comment agissent-ils sur nous en retour ? Le festival toulousain l’Histoire à venir, dont Libération est partenaire, explorera du 12 au 15 mai le thème «Vingt Mille Lieux sur la Terre». Des «lieux virtuels» aux HLM (sont-ils vraiment blêmes ?), des campagnes délaissées par les services publics aux bancs d’école... une soixantaine de rencontres, de parcours thématiques et de ­débats sont au programme du festival initié il y a cinq ans par l’université de Toulouse Jean-Jaurès, le Théâtre Garonne, la librairie Ombres blanches et les éditions Anacharsis. Parmi les questionnements abordés : Habite-t-on la mer comme on habite la Terre ? Zoom sur l’iconique Venise avec les historiennes Claire Judde de Larivière et Solène Rivoal qui décrivent la façon dont les Vénitiens ont depuis le Moyen Age transformé la lagune pour prendre soin de leur cité. Quant aux flibustiers, ces brigands des mers, l’océan était leur périlleux terrain de chasse, comme le raconte l’éditeur Frantz Olivié.

On se les figure volontiers en fils de Neptune. Créatures hybrides aux chairs incrustées de berniques fumant leur tabac dans une pince de crabe ; rois des Sept Mers, ils ont élu domicile au cœur des immensités maritimes. Sans trop de discernement, on les appelle «corsaires», «pirates» ou «flibustiers». Clarifions : un corsaire est mandaté par une autorité, un pirate agit dans une complète illégalité. Les flibustiers, population volatile implantée surtout dans les îles des Caraïbes de la seconde moitié XVIIe siècle, pouvaient tour à tour endosser les deux rôles. Ce sont eux, et singulièrement les Français, que l’on évoquera ici.

Embarqués principalement à Saint-Domingue (l’actuelle Haïti), ils ont écumé les côtes de la Guyane au golfe du Mexique et à la Floride, de la Virginie à Terre-Neuve, du golfe de Guinée à l’océan Indien et au Pacifique. A mesure de l’avancée du siècle, ils se sont répandus sur tous les océans, les vastitudes marines toujours à portée de proue.

Etonnamment, on s’est peu interrogé sur le rapport des flibustiers à la mer. Eux qui ont sillonné en tous sens la plus vaste surface du globe, comment regardaient-ils les espaces maritimes ? On ser