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TRIBUNE

Loi Duplomb : la santé publique devient la variable d’ajustement de l’agro-industrie

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En adoptant le texte - soutenu par la FNSEA - qui prétend «lever les contraintes sur l’exercice du métier d’agriculteur», l’extrême droite, la droite et une partie du centre provoquent un recul historique pour la santé publique et l’écologie, dénonce un collectif d’experts.
Lors de la manifestation contre la loi Duplomb à Paris le 8 juillet 2025. (Henrique Campos/Hans Lucas. AFP)
par Marc Billaud, directeur de recherches émérite au CNRS, Airy Chrétien, cofondateur du Collectif Citoyen 06, Jean-Marc Bonmatin, chercheur chimiste et toxicologue au CNRS et Pierre Sujobert, professeur d’hématologie, Hospices civils de Lyon
publié le 12 juillet 2025 à 11h50

La loi visant à «lever les contraintes sur l’exercice du métier d’agriculteur» qui vient d’être votée au Parlement illustre la façon dont la santé publique et la protection de l’environnement sont reléguées au rang de variable d’ajustement de l’agro-industrie. Elle démontre qu’une partie de la classe politique, en l’occurrence l’alliance de l’extrême droite, de la droite, et de la grande majorité des députés centristes subordonne l’intérêt général aux impératifs du marché.

Car de quelles contraintes fallait-il affranchir les agriculteurs ? L’une d’elles était l’interdiction d’un pesticide néonicotinoïde, l’acétamipride, banni en France depuis 2018. Cette substance capable de traverser la barrière placentaire est fortement suspectée d’effets toxiques pour le développement neurologique du fœtus et des enfants ainsi que pour la fertilité, décime les insectes pollinisateurs, est nocive pour les oiseaux, la faune aquatique et contamine les cours d’eau par sa persistance – on la retrouve même dans l’eau de pluie.

Le retour de ce pesticide est censé permettre aux agriculteurs de combattre les ravageurs de la betterave et de la noisette, face auxquels ils seraient démunis. Cette dérogation vise aussi à compenser une concurrence déloyale, l’acétamipride étant autorisé jusqu’en 2033 dans les autres pays européens. Pourtant les faits contredisent cette justification. Pour la betterave sucrière, la France maintient les rendements les plus élevés au monde (81 tonnes/hectare) et son