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TRIBUNE

«Matin brun»… dès demain ? par Franck Pavloff

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Ecoulée à plus de 2 millions d’exemplaires depuis sa publication en 1998, la nouvelle, qui avait connu un grand succès en 2002, décrivait l’impasse totalitaire. Aujourd’hui, l’auteur de ce texte étudié par de nombreux écoliers, n’en démord pas : il faut s’engager sur le terrain pour repousser l’hydre brune et développer une responsabilité de vigilance.
Rassemblement contre l'extrême droite, à Paris le 10 juin 2024. (Denis Allard/Libération)
par Franck Pavloff
publié le 27 juin 2024 à 17h07

«On frappe à la porte. Si tôt le matin, ça n’arrive jamais. J’ai peur. Le jour n’est pas levé, il fait encore brun dehors. Mais arrêtez de taper si fort. J’arrive.» Derniers mots de la nouvelle Matin brun (1). Jamais je n’aurais pensé les entendre aujourd’hui résonner à la porte de mon pays, coups de poing déclencheurs d’une catastrophe annoncée.

Ecrite en 1997 [et publiée en 1998, ndlr] alors que les mairies de Vitrolles, Orange, Toulon, Marignane tombaient aux mains du Front national, cette nouvelle rebondit en 2002 quand le FN se qualifie pour le second tour de l’élection présidentielle. Elle est devenue une voix universelle et libre qui place le lecteur devant son image en miroir : «Qu’est-ce que je fais, moi, dans mon coin, quels que soient mon âge, ma profession, ma religion, pour repousser l’hydre brune ?» L’hydre, vous savez, cette bête immonde aux capacités régénératrices : vingt-cinq ans après, elle est toujours là, au Parlement, sur les plateaux des télés complaisantes et surtout dans la tête de ceux et celles qui ne comprennent pas qu’elle a déjà pris les commandes de leurs pensées.

L’Etat brun élimine chats et chiens

Dans Matin brun, Charlie et son copain vivent l’époque trouble d’un régime politique extrême, l’Etat brun, dont les premières mesures consistent à éliminer les chats et les chiens qui n’auraien