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TRIBUNE

Mémoire du D-DAY : l’effacement progressif du Royaume-Uni

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Le débarquement, 80 ans aprèsdossier
Comment expliquer que le Débarquement en Normandie a subi une américanisation de sa mémoire, au détriment de celle du Royaume-Uni ? Pourtant, le 6 juin 1944, une majorité d’Anglo-Canadiens, 83 000 pour 72 000 soldats américains, ont pris pied sur les côtes.
Une plage du Débarquement le 6 juin 1944. (AFP)
par Guillaume Yverneau, doctorant en histoire contemporaine à l’université de Caen
publié le 5 juin 2024 à 19h47

Le 18 mai 2024, le nom de Carentan-les-Marais (Manche) surgit dans la presse britannique, en sa défaveur. La raison ? La commune a pavoisé sa ville de nombreux drapeaux européens en prévision des commémorations du «Jour-J». Celui du Royaume-Uni manque à l’appel. Carentan se trouve, certes, dans un secteur libéré par les troupes américaines, mais l’absence de ce seul drapeau a déclenché les foudres d’outre-Manche. L’erreur justifiée par la commune comme un problème de fournisseur témoigne néanmoins d’un phénomène plus global : l’effacement progressif du Royaume-Uni dans les mémoires du Débarquement en Normandie.

Sur le littoral de la Manche, cinq plages ont été choisies pour recevoir l’assaut des forces alliées en marche pour libérer l’Europe, le matin du 6 juin 1944. Omaha et Utah étaient les plages américaines, Gold et Sword les plages britanniques, et Juno celle canadienne. Le lancement par les Alliés de ce débarquement en France, accompagné des victoires décisives du rouleau compresseur soviétique, aboutit le 8 mai 1945 à la capitulation de l’Allemagne nazie et mit fin à la guerre en Europe. Le début de cette victoire du «bien», les Alliés, sur le «mal», incarné par Hitler, fut commémorée dès 1944, mais ce sont surtout les anniversaires décennaux qui prirent une importance politique pour célébrer l’action conjointe des Anglo-Américains dans cette «Grande Croisade» (Eisenhower).

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Aujourd’hui, dans ce récit du Débarquement, la place des Britanniques est réduite à la por