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TRIBUNE

Monsieur Barnier, vous voulez faire de la santé mentale la «grande cause nationale» de 2025 ? Chiche !

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Santé mentaledossier
Bruno Falissard, spécialiste de la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, réagit à l’annonce du Premier ministre et pointe qu’au moment même ou le taux de suicide augmente chez les plus jeunes, le mot «psychiatrie» a disparu du vocabulaire du politique et de l’administration au profit de l’improbable «santé mentale».
En 2022, salle d'entretien de l'unité médico-pédopsychologique au CHU de Nantes. (Théophile Trossat/Libération)
par Bruno Falissard, président de la Société française de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent et disciplines associées (SFPEADA)
publié le 26 septembre 2024 à 20h54

Le Premier ministre, Michel Barnier, a annoncé lors de son interview au JT de France 2 du 22 septembre qu’il souhaitait faire de la santé mentale la grande cause nationale de 2025. Quelle bonne idée de s’occuper de la santé mentale des Français. Il est vrai que ça ne va pas bien fort dans ce domaine. Santé publique France nous l’a rappelé il y a quelques mois : le taux de dépression augmente régulièrement depuis 2005 et ce dans toutes les classes d’âge, avec une accélération sensible depuis 2017, en particulier chez les jeunes femmes. Tout le monde est d’accord là-dessus, et c’est d’ailleurs une constatation internationale.

Curieusement, il y a beaucoup moins de communication sur l’évolution du taux de suicide dans les dernières décennies. Vers la fin du XXe siècle, le taux s’élevait à 20 pour 100 000 habitants. Depuis, il est descendu très régulièrement pour se stabiliser à 12 pour 100 000 habitants ces toutes dernières années. Ces données sont réputées fragiles, mais elles sont confirmées par l’évolution du nombre de tentatives de suicide estimées à partir du système national des données de santé (SNDS) : une diminution régulière depuis les années 2010, à une exception près, celle des jeunes et des jeunes femmes en particulier. Chez ces dernières, depuis 2015-2017, les tentatives de suicide ont quasiment été multipliées par 2 et le nombre de suicides a lui aussi augmenté, dans des proportions nettement moindres heureusement.

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