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tribune

Mort de l’économiste Daniel Cohen : un monde se clôt, par Julia Cagé

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Passeur d’idées enthousiaste, pédagogue exceptionnel, vulgarisateur hors pair… et fan de Leonard Cohen. L’élève Julia Cagé rend hommage à son mentor décédé le 20 août pour lequel l’économie n’avait rien de théorique, mais était fondamentalement politique.

Daniel Cohen en 2011. (Sacha Goldman/Collection Christophe L. AFP)
Par
Julia Cagé
Professeure d’économie à Sciences-Po Paris
Publié le 21/08/2023 à 14h48

I’m Your Man. Combien sommes-nous à être entrés, perdus, dans le bureau de Daniel Cohen, atterrés à l’idée de ne savoir que faire de nos 20 ans, et à en être ressortis les yeux pleins d’étoiles, armés des sciences sociales et surtout d’un mentor qui ne nous ferait jamais défaut ?

Daniel était un passeur d’idées – et d’enthousiasme. Il a formé et amené aux sciences économiques et sociales des générations entières d’étudiants (Philippe Askenazy, Maya Bacache, Esther Duflo, Pascaline Dupas, Camille Landais, Gabriel Zucman, etc. pour n’en citer que quelques-uns). Pédagogue hors pair, son enseignement fascinait, qu’il s’agisse d’une simple introduction à l’économie ou de systèmes d’équations beaucoup plus complexes qui font le délice des macro-économistes. Sous sa plume – et grâce à son énergie contagieuse – le bonheur de comprendre l’emportait. Pour Daniel, l’économie n’avait rien de théorique ; fondamentalement, elle était politique. Un moyen, parmi d’autres, d’éclairer les transformations du monde contemporain.

Lecteur infatigable

Prophète non égaré de nos temps modernes, et vulgarisateur hors pair, il a ainsi de l’un à l’autre de ses multiples livres su mettre à jour les limites du capitalisme contemporain, dénonçant – intellectuel engagé –