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TRIBUNE

Pavillon : sortons de «l’idéologie du bonheur familial»

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Le débat sur la maison individuelle dépasse les questions d’urbanisme. Pour l’écrivaine Sophie Divry qui a grandi en zone périurbaine, elle incarne un modèle de société fondé sur la clôture.
«Typologies» (Evry, 2014) de Bruno Fontana : issu de la série sur les pavillons Levitt du début des années 70, construits à l'image de villages américains. (Bruno Fontana)
par Sophie Divry
publié le 4 novembre 2021 à 18h56

A chaque fois qu’une nouvelle pratique passe dans la société, il faut se poser deux questions : «Que se passe-t-il si tout le monde le fait ?» ; «Que se passe-t-il si tout le monde le fait longtemps ?». En affirmant le 14 octobre dernier que le pavillon individuel était «un non-sens écologique, économique et social», la ministre du Logement Emmanuelle Wargon n’a fait que redire ce que bien des urbanistes et écologistes affirment depuis des décennies : le pavillon individuel n’est pas soutenable. Immédiatement, il a fallu rassurer en disant qu’il n’était «pas question de remettre en question le rêve de la maison individuelle».

Immédiatement, il a fallu se défendre de mépris social. Comme si les maisons individuelles au bout d’une impasse, avec clôture et chiens de garde étaient forcément des pavillons bas de gamme achetés à bas prix par des smicards. Alors que les premiers à vouloir s’isoler derrière un grand portail, ce sont souvent les riches et ce, depuis toujours. C’est monsieur le notaire, c’est monsieur le médecin qui faisaient construire leur maison de maître à l’écart du village dès le XIXe siècle. Il suffit de regarder sur Google Maps les communes aux revenus annuels les plus élevés de France, au Vésinet ou à Saint-Cyr-au-Mont-d’Or pour avoir un exemple de «mitage» pavillonnaire. Un étalement qui est un entre-soi, à l’écart du bruit, du peuple, des autres. Et ainsi, chaque décennie détruire l’équivalent d’un département français en termes de terres arabl