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TRIBUNE

Pays-de-la-Loire : plus de 500 artistes et professionnels de la culture se mobilisent contre les sévères coupes budgétaires

Politique culturelledossier
Alors que la présidente du conseil régional a annoncé une coupe drastique pouvant aller jusqu’à 73 % du budget de fonctionnement de la culture, un collectif d’artistes et de professionnels du secteur dénonce une décision qui s’apparenterait à un plan social de la culture.
Christelle Morançais, présidente du conseil régional des Pays-de-la-Loire, lors d'une réunion publique à Saint-Berthevin, en février 2024. (Yannick Billioux/ABACA)
par Un collectif
publié le 24 novembre 2024 à 12h12

Nous sommes des artistes, travailleuses et travailleurs dans la culture, liés aux Pays-de-la-Loire. Nous sommes choqué·es par les récentes déclarations de la présidente du conseil régional, madame Christelle Morançais, et terrifié·es par les arbitrages budgétaires qui seraient prévus au vote de l’assemblée régionale du 19 décembre 2024.

ll serait donc question d’une coupe drastique allant jusqu’à 73 % du budget de fonctionnement de la culture, interrompant totalement dès 2025 les subventions allouées aux festivals, aux théâtres, aux musées, aux opéras, aux maisons d’auteur·rices, aux centres d’art, aux productions audio-visuelles, aux artistes, mais aussi aux clubs sportifs et aux associations œuvrant pour l’égalité femmes-hommes et la solidarité. C’est un coup porté à la société civile tout entière. Aucune autre région n’a fait de tels choix à l’échelle nationale.

Nous avons choisi de vivre dans cette magnifique région et d’y développer nos activités. C’est ce territoire que nous arpentons chaque jour avec nos mots, nos œuvres, nos spectacles, nos concerts, nos images, nos films, parcourant les bibliothèques, les écoles, les collèges, les lycées, les maisons de quartier, les maisons de retraite, les hôpitaux, les prisons… Et c’est dans ces lieux que nous travaillons.

Chaque jour, nous constatons la vitalité culturelle de cette région. Nous savons qu’elle est le fruit de décennies du travail patient de femmes et d’hommes engagé·es qui ont œuvré à la décentralisation culturelle, faisant en sorte que les communes, les départements, les régions et l’Etat s’entendent pour créer des institutions ouvertes à toutes et tous, soutenir les initiatives citoyennes, l’entrepreneuriat culturel et faire vivre le patrimoine.

Un virage politique pris sans concertation aucune

Ce modèle français, qui repose sur le financement croisé des collectivités et de l’Etat, a produit partout émancipation, désenclavements et partage des savoirs. C’est ce modèle qui a engendré la diversité culturelle et l’attractivité des régions et des villes de France que le monde entier nous envie.

Tout cela est aujourd’hui violemment attaqué par la région des Pays-de-la-Loire qui, sous couvert de la cure d’austérité imposée aux collectivités par le gouvernement Barnier, annonce 100 millions d’euros d’économie (quand on lui demande 40 millions d’euros), dont une bonne partie prise sur la culture, le sport, l’égalité femmes-hommes et les solidarités, arguant que «dans de nombreux domaines, la région n’a plus vocation à intervenir, ou à intervenir autant».

Ce virage politique, pris sans concertation aucune et du jour au lendemain, ferait vaciller tout l’écosystème en fragilisant ses grands équilibres.

Nous dénonçons ce qui s’apparenterait à un plan social de la culture. Cette décision serait mortifère pour les 150 000 emplois concernés, qu’ils soient permanents ou intermittents, et pour tout un ensemble de professions libérales et de petites entreprises qui gravitent autour du secteur de la culture publique, hautement créateur d’emplois et de richesse économique.

Nous dénonçons l’incohérence d’une politique régionale qui dénature par ses choix dangereux ses trois priorités politiques : la jeunesse, l’emploi et la transition écologique.

Nous dénonçons une dialectique visant à créer de la division au sein de la société, à désigner les bonnes et les mauvaises manières de produire de la vie artistique et culturelle, alors que c’est la combinaison d’un secteur public de la culture en bonne santé avec des industries culturelles dynamiques qui fait la richesse et la variété du tissu culturel français.

Nous demandons, enfin, que les mécanismes démocratiques soient respectés, et que les acteurs et actrices culturel·les soient consulté·es dans la prise d’une décision aussi lourde de conséquences pour l’ensemble des électeur·rices, citoyen·nes, usager·es ligériens et ligériennes.

Parmi les signataires : Alain Mabanckou Ecrivain, directeur artistique du festival Atlantide Alice Zeniter Autrice, metteuse en scène Anna Mouglalis Comédienne Christophe Honoré Réalisateur, scénariste, écrivain et metteur en scène Daniel Pennac Ecrivain Dominique A Chanteur, auteur, compositeur Alexis HK Auteur compositeur, chanteur Emily Loizeau Autrice-compositrice-interprète India Hair Comédienne Jean Rouaud Auteur, prix Goncourt 1990 Jeanne Cherhal Chanteuse Jérôme Clément Président du festival Premiers Plans d’Angers, ancien directeur du CNC, ancien président d’Arte, Marielle Macé Ecrivaine et enseignante Henri Texier Contrebassiste de jazz Amala Dianor Chorégraphe Etienne Davodeau Auteur de bande dessinée Marc Caro Réalisateur Vanessa Wagner Pianiste Tanguy Viel Ecrivain, scénariste Xavier Veilhan Plasticien Zaho de Sagazan Autrice, compositrice, interprète Pierrick Sorin Artiste plasticien Patrick Bouchain Architecte Phia Menard Chorégraphe, plasticienne Philippe Decouflé Chorégraphe Philippe Katerine Chanteur, auteur, compositeur, acteur Philippe Torreton Comédien, metteur en scène…