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TRIBUNE

Pesticides, aliments ultra-transformés… Il y a urgence à reconnaître l’origine industrielle des cancers

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Si la lutte contre les facteurs de risques individuels, comme le tabac ou l’alcool, permet un recul de la maladie, elle reste insuffisante. Il est temps d’admettre que le cancer est aussi lié à l’industrie agroalimentaire ou à l’agriculture intensive, appellent le professeur Pierre Sujobert et le chercheur Marc Billaud.
Traitement chimique dans une exploitation de l'Oise. (Sylvain Cordier/Biosphoto via AFP)
par Pierre Sujobert, professeur d’hématologie, université Lyon-1, Hospices civils de Lyon et Marc Billaud, directeur de recherches émérite CNRS, Centre de recherches en cancérologie de Lyon
publié le 23 mars 2025 à 10h16

Chaque année, plus de 430 000 Françaises et Français sont touchés par le cancer, dont l’incidence a doublé depuis 1990. Malgré les progrès médicaux qui permettent de guérir plus d’une personne sur deux, il reste la première cause de mortalité dans notre pays. Dans les médias, deux types de discours dominent : d’un côté, celui de l’innovation biomédicale et des progrès thérapeutiques ; de l’autre, celui de la prévention qui rappelle que plus de 40 % des cancers pourraient être évités en réduisant certains facteurs de risque bien identifiés (tabac, alcool, alimentation déséquilibrée, surpoids, sédentarité). D’où l’importance de campagnes de prévention qui nous enjoignent à modifier nos comportements afin d’enrayer cette épidémie. Mais, en insistant presque exclusivement sur la responsabilité individuelle, cette politique préventive occulte des dimensions essentielles de cette maladie.

Plusieurs articles de presse ont récemment mis en lumière des observations épidémiologiques parues dans des revues scientifiques de premier plan, et qui apportent un autre éclairage sur les causes du cancer. L’augmentation des cas ne peut pas être attribuée exclusivement au vieillissement de la population et à un meilleur dépistage. En effet, en trente ans, l’incidence a presque doublé chez les adultes de moins de 50 ans, et chez les enfants elle a progressé de 35 % en cinquante ans aux Etats-Unis et de 0,5 % à 1 % par an en Europe depuis 1970. Sauf à supposer que les plus jeunes d’entre nous soie