On nous reproche le silence et je dis déjà «nous» au «eux» visé, je dis «nous» comme si j’appartenais à une communauté, l’autre communauté, la nommée «Eux», ce pronom diabolique.
Oui, on nous interpelle d’un doigt accusateur, on dit – où sont ils ? Pourquoi se taisent-ils ? Et par un insoupçonné soupçon me sens visé et cela fait belle lurette que je sais la cible accrochée dans mon dos. Je sais qui sont les «ils» et qui sont «eux» .
Pour ne pas dire «les arabes et les noirs» les pronoms toujours viennent à la rescousse. Et c’est vrai qu’aucun «noir» de banlieue, pas plus que de «reubeu» de cité ne s’est élevé pour dénoncer ce qu’il faut bien appeler une abomination (celle du 7 octobre) .
Moi qui n’habite plus les HLM me suis aussi tu, me suis presque planqué, terrassé que j’étais par une incroyable frousse, celle de trahir, de donner un avis qui m’aurait fait perdre une moitié de moi et la moitié des miens. J’ai eu peur d’être accusé d’antisémitisme par ceux qui pointent déjà leur doigt, trop heureux de tenir la preuve de la non-solubilité de ma race dans la République, peur d’être traité de traître par des fondus pressés de m’éviscérer au nom de leur dieu. Peur du vide, peur de me tromper, peur d’être victime de deux camps.
Me suis tu pour ne pas blesser mon père, pour ne pas avoir à subir les foudres des «miens» . Les «miens» bon sang, cet autre détestable pronom, ce prolongement infecté de mo