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TRIBUNE

Pourquoi l’affaire Pierre Palmade fascine-t-elle ?

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Procès de Pierre Palmadedossier
Si ce dramatique fait divers résonne autant, des chaînes de télévision aux discussions entre collègues, c’est parce que sur cette route se sont rencontrés, de manière irréversible, deux mondes incompatibles, estime l’universitaire Marie-Eve Thérenty.
«Les faits divers qui mettent en scène des célébrités rattrapées par le sort ont toujours été extrêmement commentés, parfois à une échelle mondiale.» (montage «Libération»). (Eric Dervaux/Hans Lucas. AFP)
par Marie-Eve Thérenty, Professeure de littérature française à l’université Paul-Valéry Montpellier-3, membre de l'Institut universitaire de France
publié le 27 février 2023 à 18h17

«Vous avez vu, l’affaire Palmade ?» Cette question a résonné partout ces dernières semaines dans les bureaux, entre amis, en famille même. L’affaire dite Palmade illustre la fascination que l’on éprouve pour les faits divers. Le plus étonnant dans cette débauche de discours dans les médias comme dans les sociabilités ordinaires est que, contrairement à d’autres sujets d’actualité plus polémiques, tout le monde est généralement d’accord. Finalement avec les conversations sur Palmade, nous sommes plus proches de l’excitation du potin que du commentaire averti de l’information. Pourquoi alors continuer si c’est pour répéter les mêmes banalités ?

Alors que les sociologues (voir Theodor W. Adorno ou Pierre Bourdieu) voient parfois dans la circulation du fait divers une forme de dépolitisation et d’affaiblissement de la pensée critique, l’anthropologue Robin Dunbar compare de manière plus positive ce plaisir du ragot au rituel d’épouillage réciproque des grands singes, là pour créer le plaisir du contact, fonder le commun et dessiner le périmètre de la communauté. Le chercheur Yoan Vérilhac, spécialiste du sensationnalisme, voit même dans le bavardage médiatique une sorte de ferment démocrat