Les émeutes de novembre 2005 constituent un épisode unique dans l’histoire contemporaine française. Dans plusieurs centaines de communes et de quartiers, une immense colère s’est manifestée après la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré dans un transformateur électrique, cachés alors qu’ils étaient pris pour cible dans une opération de police avec laquelle ils n’avaient rien à voir.
La grande majorité des gens est capable aujourd’hui de situer «les émeutes des banlieues». Cette histoire-là est rentrée dans notre histoire, en même temps qu’elle a inscrit la question des quartiers populaires dans notre paysage politique : plusieurs générations se sont socialisées et politisées à partir de cette déflagration. Une myriade d’initiatives associatives (pour leur immense majorité, méconnues) a émergé dans les quartiers de cette prise de conscience qui valait aussi appel à l’action. Par ailleurs, depuis la fin des années 2000, des collectifs ont fait incursion dans le champ électoral : en de nombreuses villes, les listes indépendantes sont venues rappeler, «dans l’esprit de 2005», la présence très politique des habitant·e·s des quartiers.
Ce qui est politique et ce qui ne l’est pas
La position symbolique des émeutes comme repère politique positif s’est gagnée «contre» le champ politique traditionnel. La politisation de l’événement s’est faite dans une forme de solitude, presque totale pendant les émeutes, relative ensuite (1). Solitude qui s’inscrit dans la continuité d’une histoire entre les quartiers populaires et la gauche : car