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Procès des viols de Mazan : le «boys’ club» et les endormies, par Martine Delvaux

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Procès des viols de Mazandossier
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Entre nausée et haine, l’écrivaine québécoise réagit sur ce que lui évoque le procès, en cours, de Dominique Pelicot qui a violé et fait violer par ses désormais coaccusés son épouse, sous l’emprise de médicaments. Un récit, initialement paru au Canada dans «la Presse», qui interroge le désir masculin pour des femmes inanimées, des presque mortes.
Photo issue de la série «The Substitute» (2017). (Dawn Wooley)
par Martine Delvaux, écrivaine québécoise
publié le 13 septembre 2024 à 13h04

Ces hommes, trouvés par l’entremise d’un site web, partageaient un même désir criminel : violer une femme inconsciente. Une femme soumise chimiquement.

Le mari n’a jamais nié ses crimes : des milliers de photos, prises par lui, les documentent et ont permis à la police de révéler à la victime ce qui lui était fait depuis des années sans qu’elle le sache. Des symptômes physiques (fatigue, pertes de mémoire) n’ont mis la puce à l’oreille d’aucun médecin, d’aucun gynécologue. Les somnifères étaient si puissants que la victime, chaque matin, sortait d’une sorte de coma, parfaitement inconsciente de ce qu’on lui avait fait subir la veille.

J’écris ces lignes et j’ai la nausée. Depuis la première mention de cette histoire, il y a deux ans, je repense aux contes de fées de mon enfance, aux innombrables incarnations de femmes ensommeillées, presque mortes, et sorties de leur torpeur par le baiser d’un prince – depuis Blanche-Neige et les Sept Nains qui la «veillent» et la Belle au bois dormant, jusqu’aux Belles Endormies de Yasunari Kawabata (1961) où un homme âgé paye pour passer la nuit aux côtés d’