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Procès Sarkozy : la justice doit combler les silences qui accompagnent ses décisions, par Jean-Jacques Urvoas

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Comme lors de la condamnation de Marine Le Pen, celle de l’ex-président de la République pour «association de malfaiteurs» a souffert d’un défaut d’explication publique et a laissé le champ libre à une médiatisation déséquilibrée. Or, la force d’une décision ne réside pas que dans sa conformité aux textes, mais dans sa capacité à être reçue par la société, analyse l’exgarde de Sceaux.

L'ex-président Sarkozy s'adressant aux médias après sa condamnation à cinq ans de prison par le tribunal parisien, le 25 septembre 2025. (Christophe Ena/AP)
Par
Jean-Jacques Urvoas, ancien garde des Sceaux, professeur de droit public à l’université de Brest
Publié le 03/10/2025 à 6h00

Sans explication, la justice s’expose à l’incompréhension et avec elle, à une perte de légitimité aux yeux du citoyen. Il est regrettable que les autorités du tribunal judiciaire de Paris n’aient pas tiré les leçons du 31 mars 2025, date à laquelle Marine Le Pen fut condamnée pour «détournement de fonds publics», sans que aucune parole institutionnelle ne vienne accompagner la décision.

Le schéma s’est reproduit avec la condamnation de Nicolas Sarkozy pour «association de malfaiteurs». Là encore, le défaut d’explication publique a laissé le champ libre à une médiatisation déséquilibrée. Tandis que quelques représentants syndicaux des magistrats tentaient, dans l’urgence, d’éclairer les obscurités terminologiques rythmant le très long (380 pages) verdict du tribunal, les avocats, rompus à l’exercice médiatique, occupaient les plateaux télévisés, sculptant des éléments de langage faisant passer leur client pour une victime offensée.

Des heures d’antenne, à la radio comme à la télévision, ont alors servi de scène à une véritable guerre des récits. Et, dans ce tumulte