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TRIBUNE

Réfugiés: aux sources d’une hospitalité sélective

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Guerre entre l'Ukraine et la Russiedossier
L’accueil favorable réservé aux Ukrainiens fait contraste avec le traitement dégradant reçu par ceux appelés «les migrants» depuis dix ans. Cette réception à géométrie variable n’est pas neuve et s’observe au tournant des XIXe et XXe siècles, souligne l’historienne Delphine Diaz.
Vers 1920, des immigrants polonais arrivent en gare d’Oignies (Pas-de-Calais) pour aller travailler dans les mines d’Ostricourt. (Albert Harlingue/Roger Viollet)
par Delphine Diaz
publié le 20 mars 2022 à 9h16

En près de trois semaines, l’invasion de l’Ukraine par la Russie de Vladimir Poutine a forcé plus de trois millions de civils à traverser les frontières orientales de l’Union européenne. De tels chiffres, pourtant sidérants, ne tiennent pas compte des personnes déplacées qui ont quitté les villes les plus ciblées par les crimes de guerre de l’armée russe. Par sa brutalité et son ampleur, cet exode à la fois intérieur et international ravive le triste souvenir d’autres épisodes migratoires qu’a connus l’Europe dans son passé, que l’on pense aux centaines de milliers de civils belges et français jetés sur les routes à partir de l’été 1914, aux quelque 475 000 républicains espagnols qui se sont pressés à la frontière pyrénéenne en 1939, ou aux millions de «personnes déplacées» pendant et après la Seconde Guerre mondiale.

Mais comparaison n’est pas raison, et l’exil ukrainien a ses caractéristiques propres : constitué de civils – essentiellement de femmes, d’enfants (1,5 million selon l’Unicef) et de personnes âgées des deux sexes –, il se dirige vers plusieurs pays frontaliers de l’Ukraine et suscite, à travers tout le continent, manifestati