Menu
Libération
TRIBUNE

Sciences sociales : la France doit accueillir les chercheurs victimes de la chasse aux sorcières de Donald Trump

Article réservé aux abonnés
Le trumpisme décortiquédossier
Alors que l’administration Trump a annoncé couper les financements de tout projet de recherche contenant les termes «femmes», «inclusion», «traumatisme», ou encore «LGBT», la France doit lancer un programme d’accueil des universitaires américains concernés, demande Romain Huret, historien des ­Etats-Unis et président de l’Ecole des hautes études en sciences sociales.
La science trumpiste ne comporte pas de victime, pas d’inégalité, pas de discrimination, pas de statut social. (Christophe MAOUT/Photo Christophe Maout pour Libération)
publié le 10 février 2025 à 11h46

On en est donc là. En moins de trois semaines. Principale agence de financement de la recherche fondamentale aux Etats-Unis depuis la Seconde Guerre mondiale avec plus de 9 milliards de dollars de crédits, la National Science Foundation (NSF) a annoncé ne plus pouvoir financer les projets de recherche comprenant des mots comme «femmes», «inclusion», «traumatisme», «égalité», «exclusion», «inégalité», «statut», «genre», mais aussi «institutionnel», «LGBT», et même le sobre mais visiblement trop connoté «historiquement». La liste est longue comme plusieurs bras : de «A» pour «activisme» à «W» pour «women». La palme revient au mot de «biais» (bias), banni sous toutes ses déclinaisons tant il semble incongru d’envisager pour les trumpistes la possibilité de biais dans la société états-unienne.

On en est donc là. Pour comprendre l’ampleur de ce qui se joue depuis quelques semaines, le filtre appliqué aux sciences sociales françaises des cinquante dernières années se transformerait en un grand jeu de massacre de Foucault à Bourdieu, jusqu’aux historiennes des femmes et du genre, aux économistes des inégalités et aux grands spécialistes du fait guerrier et des catastrophes. La science trumpiste ne comporte pas de victime, pas de femme, pas de race, pas d’iné