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TRIBUNE

Vivre plus longtemps est encore désirable, même dans un monde en crise

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A rebours des discours sur la dégradation du climat et la surpopulation mondiale, la science et le progrès social ont bien les moyens d’offrir à l’humanité une fin de vie plus longue et en meilleure santé, estiment les chercheurs Samuel Pavard et Lucie Vanhoutte.
Des vies plus saines représentent une voie possible pour allonger la durée de vie en bonne santé. Ici, le photographe Martin Parr, en 2021. (Martin Parr/Magnum Photos)
par Samuel Pavard, chercheur en éco-anthropologie, Muséum national d'histoire naturelle, CNRS, université Paris-Cité, Paris et Lucie Vanhoutte, chercheuse en démographie et anthropologie, Institut national des études démographiques (Ined), Paris
publié aujourd'hui à 12h23

En tant que chercheurs travaillant sur le vieillissement, nous sommes confrontés à une opinion publique qui s’interroge sur l’incompatibilité entre le projet scientifique, social et politique visant à allonger la durée de vie et celui visant à répondre aux urgences environnementales.

Il s’agit d’une question légitime à laquelle nous souhaitons répondre, en essayant de raviver l’idée que la science et le progrès social ont les moyens d’offrir à l’humanité une fin de vie plus longue et en meilleure santé, sans pour autant nuire à la planète ni laisser quiconque sur le bord du chemin.

Une première ligne de critique considère l’allongement de la vie comme un luxe de pays riches au regard d’autres priorités auxquelles l’humanité est confrontée, comme répondre aux défis climatiques ou lutter contre l’érosion de la biodiversité. En outre, prolonger la vie en soignant les maladies liées au grand âge serait coûteux écologiquement. Enfin, mettre en place des politiques favorisant la longévité ne ferait pas sens dans un contexte mondial de surpopulation.

Ces critiques renferment, selon nous, quelque chose de plus profond. Dans l’esprit de beaucoup, l’augmentation de l’espérance de vie observée depuis des décennies est associée à la recherche d’une croissance économique immodérée, et à une croyance absurde dans l’omnipotence du progrès technologique.

Plus que par son coût environnemental direct, l’extension de la vie serait coupable par association avec un système qui a engendré la crise