En tant que chercheurs travaillant sur le vieillissement, nous sommes confrontés à une opinion publique qui s’interroge sur l’incompatibilité entre le projet scientifique, social et politique visant à allonger la durée de vie et celui visant à répondre aux urgences environnementales.
Il s’agit d’une question légitime à laquelle nous souhaitons répondre, en essayant de raviver l’idée que la science et le progrès social ont les moyens d’offrir à l’humanité une fin de vie plus longue et en meilleure santé, sans pour autant nuire à la planète ni laisser quiconque sur le bord du chemin.
Une première ligne de critique considère l’allongement de la vie comme un luxe de pays riches au regard d’autres priorités auxquelles l’humanité est confrontée, comme répondre aux défis climatiques ou lutter contre l’érosion de la biodiversité. En outre, prolonger la vie en soignant les maladies liées au grand âge serait coûteux écologiquement. Enfin, mettre en place des politiques favorisant la longévité ne ferait pas sens dans un contexte mondial de surpopulation.
Ces critiques renferment, selon nous, quelque chose de plus profond. Dans l’esprit de beaucoup, l’augmentation de l’espérance de vie observée depuis des décennies est associée à la recherche d’une croissance économique immodérée, et à une croyance absurde dans l’omnipotence du progrès technologique.
Plus que par son coût environnemental direct, l’extension de la vie serait coupable par association avec un système qui a engendré la crise