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Libération
A la télévision ce soir

Censeurs pour l’échafaud

(© EFFERVESCENCE)
publié le 20 mars 2017 à 18h46

Ces dernières décennies, la société française a pu penser qu'elle en avait fini avec la censure. Libéré de ses carcans politiques et moraux dans le mouvement d'émancipation post-68, le pays frondeur de Voltaire et des Lumières a cru pouvoir presque tout dire et montrer, à l'abri d'une censure d'Etat quasiment disparue. Un long combat que l'attentat de Charlie Hebdo a réveillé et qui constitue le point de départ de ce documentaire dense et au ton grave sur un sujet prêtant le flanc à tous les emballements les plus irrationnels. La grande originalité de ce film de Valérie Manns tient à ce qu'il ne donne la parole qu'à des censeurs. Des censeurs «légaux», œuvrant au nom de l'Etat de droit et du très subjectif «consensus social» à la Commission de classification des œuvres cinématographiques ou au Conseil d'Etat. Mais aussi aux militants de groupes de pression ou aux autorités religieuses. Devenue invisible, protéiforme et arbitraire là où elle était identifiable et prévisible en la personne d'un Alain Peyrefitte, ministre de l'Information de la France gaulliste, la censure dont s'est emparée la société civile a changé de forme et de visage. Mais elle n'a jamais disparu, comme le montre cette solide mise en perspective historique.