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Série: Mécanique médiatique et méfaits divers

Dans une série documentaire, Arte se saisit d’affaires criminelles et décrypte le rôle et l’impact du récit collectif.
(Program33)
publié le 8 septembre 2017 à 18h56

Dans une rue à peine éclairée du quartier de Whitechapel à Londres, une silhouette avance d’un pas pressé, sacoche à la main, avant de disparaître dans la brume. Combien de fois les médias et le cinéma ont-ils représenté ainsi le célèbre et premier tueur en série de l’histoire, Jack l’Eventreur ? Le mystérieux assassin qui a tué des dizaines de prostituées en 1888 incarne la figure du monstre moderne, faisant ressurgir les vieilles terreurs de l’Angleterre puritaine dans l’actualité. C’est ainsi que le lecteur découvre non seulement le crime sérial mais une fenêtre inédite sur la prostitution et la vie dans les bas-fonds de la capitale.

Complotisme. Arte diffuse ainsi une série de documentaires de vingt-six minutes dont la trame est construite autour d'un fait divers et de sa légende médiatique. Plusieurs historiens se relaient pour décrypter des affaires criminelles emblématiques survenues dans le monde entier. On assiste à la naissance du complotisme avec les extraterrestres de Roswell, ou l'on s'attarde sur le crime odieux qui a inspiré M le Maudit. En France, un documentaire explore le périple judiciaire de Violette Nozières, cette jeune fille de 18 ans qui a assassiné ses parents aux barbituriques. La voici devenue, dans l'opinion publique, une parricide sans âme, mortelle égérie des années 30. Les images d'archives permettent de reconstituer le procès retentissant de celle qui incarnera une héroïne des surréalistes.

La deuxième affaire française est particulièrement intéressante, notamment parce qu'elle est bien moins connue et évoque les cycles de la haine publique lorsqu'il s'agit de meurtre d'enfant. En 1907, on retrouve le corps de la petite Marthe, 11 ans, dans une consigne de la gare de l'Est. Elle a été violée et poignardée. L'auteur du crime est un ami des parents, un certain Albert Soleilland. A l'époque, le Parlement réfléchit à abroger la peine de mort mais le «monstre Soleilland» déchaîne les passions. La complainte populaire réclame le châtiment suprême. « A lire les journaux la police est inefficace, la justice est laxiste et la prison confortable» , décrit un historien.

Haine. La rengaine est bien familière… En 1976, avec l'affaire Patrick Henry, les pulsions meurtrières reviennent sur le devant de la scène. Le film montre ainsi l'extraordinaire continuité médiatique dans ce genre de dossiers, cette haine resurgie du fond des âges qui traverse l'histoire judiciaire.