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Libération
Critique

Photo / «Dandaka», hindou mythe

(Photo Vasantha Yogananthan)
publié le 5 octobre 2018 à 18h16

Et le drame survint. Rama et Sita filaient l'amour doux, exilés dans un refuge de verdure. Par vengeance, le démoniaque Ravana enlève la princesse, laissant Rama inconsolable, baignant dans un océan de chagrin. «C'est le livre où le conte bascule, explique Vasantha Yogananthan. L'enlèvement de la princesse introduit la guerre à venir.» Le photographe, français aux origines sri-lankaises, poursuit dans ce tome 4 son exploration du grand mythe indien du Ramayana, entamée en 2013. Reprenant le principe des livres précédents, il retrace le chemin parcouru par les héros, guettant dans la culture indienne contemporaine les émanations de ce conte philosophique, tel ce Ravana défiant l'ennemi de son poignard de papier mâché, mi-fier mi-ridicule.

Mais le récit ne suit pas son cours sans surprises : pour la première fois, le livre inclut des fragments d'une bande dessinée, publiée dans les années 70. «Chaque chapitre intègre l'utilisation d'images vernaculaires liées au mythe. On voulait commencer avec des éléments très anciens, comme des lithographies extraites de vieilles versions du Ramayana, et avancer vers des éléments plus contemporains, type bande dessinée. Elle a la particularité d'être la version la plus connue du mythe. C'est par elle que tous les gamins indiens découvrent l'histoire.» D'où une narration plus directe, moins elliptique, qui résonne avec l'aspect dramatique de ce chapitre. Les photographies sont parfois pensées en miroir de la BD : Vasantha Yogananthan avait découpé des cases pour les montrer à ses modèles, qui imitent la pose de ces personnages de crayon. L'hommage est poussé jusqu'à la couverture, épaisse, cartonnée, délicieux rappel de nos lectures enfantines.

On commence seulement à saisir l'ampleur de ce travail de sept ans, impliquant jusque-là 11 voyages, 5 500 km, une autodiscipline thatchérienne et un certain sens de la créativité quant à son financement. Spoiler : le prochain tome ne comprendra plus de figure humaine. Rendez-vous en juin.