Elisabeth Badinter Philosophe et écrivaine, spécialiste du siècle des Lumières, elle interroge sans cesse la place de la femme dans la société ou le rôle du féminisme, comme dans Fausse Route, et se montre très vigilante sur la laïcité. Elle a été auditionnée par le groupe de travail du Sénat.
Quelle est votre position sur la gestation pour autrui ?
Je suis pour sa légalisation en France et pour une harmonisation européenne, donc favorable à l'initiative du Sénat. Si l'on croit à un instinct maternel qui empêcherait une femme enceinte de se détacher du foetus qu'elle porte, alors cette loi peut être rejetée. Ce n'est pas mon cas. Je pense qu'on peut porter un enfant sans faire de projet, sans fantasmer, sans «tricoter» une relation avec lui. Voyez l'avortement. A ce moment-là, la gestation pour autrui (GPA) peut être autorisée à certaines conditions.
Si on porte un enfant pour un couple qui ne peut en avoir, comme une action tout à fait extraordinaire et belle, cela ne me choque pas du tout. Mais je pense qu'il faut accepter un droit au remords, comme dans la loi anglaise. Une femme de bonne foi au départ peut être jouée par son inconscient et se dire après l'accouchement : «Je veux le garder.» Il faut alors le prendre en compte. Mais l'expérience montre que les rétractations sont rarissimes.
Que répondez-vous à l’argument de la marchandisation du corps ?
C'est effectivement le deuxième argument contre la GPA. L'exemple américain peut nous amener à penser qu'il s'ag