Oksana, 49 ans, arrive d’un pas pressé, le regard mauvais et la voix énervée. «Vous êtes de la mairie, c’est ça ? Vous daignez enfin vous déplacer ?» Quand on lui explique que non, que l’on est français, elle se radoucit : «Désolé, ça fait quatre jours qu’on a été bombardé et personne ne nous aide. Comment on fait, nous, sans eau ni électricité dans l’immeuble ? Pourquoi personne ne nous demande ce dont on a besoin ?» Elle interpelle ses voisins – Lida, une femme de «presque» 80 ans, et Valery, un retraité de 62 ans – qui discutent devant leur porche. Les deux acquiescent.
Reportage
Oksana et ses voisins habitent dans une barre d’immeuble de l’époque soviétique du parc Leski, à Mykolaïv, ville du sud de l’Ukraine, à environ 130 kilomètres d’Odessa. Un quartier populaire et paisible avant l’invasion russe, avec des allées de marronniers et de peupliers blancs gagnés par le lierre, où les habitants ont planté des tulipes au milieu de pneus usagés.
Mercredi à 6 heures du matin, un missile russe a frappé le toit du quatrième et dernier étage. Il l’a traversé jusqu’au premier, avalant trois appartements et ravageant une dizaine d’autres. L’explosion a tué huit habitants et blessé quatre, dont un homme de 60 ans, toujours dans le coma. Deux pompiers se sont par ailleurs cassé une jambe en fouillant les décombres.