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Tensions

A Madagascar, un contingent militaire allié aux manifestants affirme avoir pris le contrôle des forces armées

Une unité de soldats a dit ce dimanche 12 octobre avoir sous ses ordres la totalité de l’armée malgache, après avoir rallié la veille le mouvement social antigouvernement. Le président malgache, lui, dénonce une tentative de coup d’Etat.

Samedi 11 octobre à Antananarivo, Madagascar. (Zo Andrianjafy/REUTERS)
Publié le 12/10/2025 à 8h45, mis à jour le 12/10/2025 à 15h05

Un contingent de l’armée malgache a affirmé ce dimanche 12 octobre avoir pris le contrôle des forces armées du pays, après avoir rejoint la veille les manifestants antigouvernementaux et appelé les forces de sécurité à «refuser les ordres».

«Désormais, tous les ordres de l’armée malgache, qu’ils soient terrestres, aériens ou militaires, émaneront du quartier général du Capsat (Corps d’armée des personnels et des services administratifs et techniques)», ont annoncé des officiers de ce contingent dans une déclaration vidéo.

Le ministre des Armées malgache a par la suite reconnu comme chef d’état-major un officier choisi parmi les militaires dissidents s’étant rangés du côté des manifestants anti-Rajoelina, le général Démosthène Pikulas. «Je lui donne ma bénédiction», a déclaré le ministre à l’adresse de Pikulas, choisi par l’unité Capsat.

«Tentative de prise du pouvoir illégale»

Quelques heures plus tôt, le président malgache, Andry Rajoelina, a déclaré qu’une «tentative de prise du pouvoir illégale et par la force» était en cours.

«La présidence de la République souhaite informer la nation et la communauté internationale qu’une tentative de prise du pouvoir illégale et par la force, contraire à la Constitution et aux principes démocratiques, est en cours sur le territoire national», a déclaré Rajoelina dans un communiqué, sans fournir de preuve à ce qu’il avance.

Le Président réagissait aux événements de la veille, lorsque des soldats malgaches ont rejoint les milliers de manifestants dans les rues d’Antananarivo, appelant les forces de sécurité à «refuser les ordres de tirer» sur la population et condamnant la répression policière récente. Avant de quitter leur base militaire du district de Soanierana, à la périphérie d’Antananarivo, les soldats du Capsat avaient appelé à la désobéissance. En 2009, cette base avait déjà mené une mutinerie lors du soulèvement populaire qui avait porté au pouvoir l’actuel président.

La manifestation de samedi à Antananarivo a été l’une des plus importantes depuis le début de la contestation le 25 septembre, lancée par le mouvement Gen Z pour protester contre les coupures d’eau et d’électricité et qui s’est muée en une remise en cause des responsables politiques au pouvoir, à commencer par le Président, Andry Raojelina.

Des soldats ont affronté les gendarmes devant une caserne et sont entrés dans la ville à bord de véhicules militaires pour rejoindre les manifestants sur la symbolique place du 13 Mai, devant la mairie d’Antananarivo, où ils ont été accueillis par des acclamations et des appels à la démission de Rajoelina.

«Division entre les citoyens»

Samedi soir, le nouveau Premier ministre, Ruphin Zafisambo, a assuré que le gouvernement, «qui se maintient fermement», était «prêt à collaborer et à écouter toutes les forces : les jeunes, les syndicats et l’armée».

«Madagascar ne pourra pas résister à d’autres crises si cette division entre les citoyens persiste», a poursuivi le général Zafisambo dans un bref discours filmé.

De son côté, la présidence a publié un communiqué assurant que le président Rajoelina «rest[ait] dans le pays» et «continu[ait] de gérer les affaires nationales».

Au moins 22 personnes ont été tuées depuis le début des manifestations et plus d’une centaine blessées, d’après un bilan des Nations unies. Le président Rajoelina a démenti des «nombres erronés» mercredi, estimant les «pertes de vies» à 12, tous «des pilleurs, des casseurs», selon lui.

Air France a d’ores et déjà annoncé ce dimanche avoir suspendu ses liaisons entre l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle et Antananarivo depuis samedi et jusqu’au lundi 13 octobre inclus, «en raison de la situation sécuritaire». La reprise des opérations «restera soumise à une évaluation quotidienne de la situation sur place», a précisé la compagnie.

De son côté, la compagnie Air Austral qui opère entre l’île de la Réunion et Madagascar, a indiqué qu’elle avait annulé une rotation samedi mais que ses vols étaient «maintenus» pour la journée de dimanche.

Mise à jour à 18 h 05 avec la reconnaissance comme chef d’état-major d’un officier choisi parmi les militaires dissidents.