Des arrestations et une étrange accusation. Quatre militaires français escortant un général de la force de l’ONU ont été arrêtés lundi à l’aéroport de Bangui, la capitale de la Centrafrique. Ils étaient toujours dans les locaux de la gendarmerie dans la nuit, assure un responsable de l’état-major des armées françaises, ajoutant que «le problème est en cours de règlement». «A ce stade, il n’y a pas d’inquiétude», ajoute-t-il.
«L’équipe de protection rapprochée du général (Stéphane) Marchenoir, chef d’état-major de la Force de la Minusca (Mission des Nations unies en Centrafrique), composée de quatre militaires français, a été arrêtée cet après-midi à l’aéroport de Bangui» alors qu’ils escortaient le général qui devait s’envoler pour Paris, a confirmé l’ambassade dans un communiqué sur ses comptes Twitter et Facebook.
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Sur les réseaux sociaux, de nombreux comptes ont affirmé que les militaires français avaient voulu «assassiner» le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra, s’appuyant sur des photos de leur présumé véhicule et d’armements «saisis» lors de leur interpellation. Ce qu’a évidemment démenti le chef d’état-major parisien des armées, qui dénonce une arrestation «sans raison particulière» : «Ils étaient à l’aéroport pour escorter le général, c’est un concours de circonstances qui a fait qu’au même moment, l’avion du président Touadéra atterrissait.»
«L’ambassade regrette vivement cet incident. Elle condamne son instrumentalisation immédiate sur certains réseaux malveillants et la désinformation grossière à laquelle elle donne lieu», écrivait la représentation diplomatique lundi soir. Dans un communiqué, la Minusca, qui compte environ 15 000 militaires et policiers dans le pays, a «regretté cet incident et condamne vivement son instrumentalisation sur les réseaux sociaux, dans une tentative de manipulation de l’opinion publique» et «rejette catégoriquement les accusations d’atteinte à la sûreté de l’Etat».
Arrestations sur fond de tensions franco-russe
Cet incident survient au moment où les relations entre la France et son ancienne colonie sont de plus en plus tendues, exacerbées par une féroce guerre d’influence entre Paris et Moscou dans ce pays en guerre civile depuis 2013. Paris reproche à la Centrafrique d’être «complice» d’une campagne antifrançaise orchestrée par Moscou notamment par d’innombrables trolls sur les réseaux sociaux et dans certains médias. Et Moscou reproche à Paris d’accuser la compagnie de sécurité privée russe Wagner d’avoir fait main basse sur le pouvoir et les ressources du pays.
La Centrafrique, parmi les pays plus pauvres du monde, est en guerre civile depuis près de neuf ans. Fin décembre 2020, une coalition de plusieurs des groupes armés qui contrôlaient alors plus des deux tiers du territoire avait lancé une offensive en direction de Bangui pour renverser le président Touadéra à la veille de la présidentielle.
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Le chef de l’Etat, finalement réélu, avait alors appelé Moscou à la rescousse de son armée démunie et mal entraînée et des centaines de paramilitaires russes étaient venues s’ajouter à de nombreux autres présents depuis trois ans. Des «instructeurs non armés» assure Moscou, des combattants de Wagner, selon l’ONU et la France, qui les accusent de commettre des violations de droits de l’Homme.
Depuis leur contre-offensive fulgurante, les militaires centrafricains, essentiellement grâce aux paramilitaires russes, ont regagné la majeure partie du territoire, poussant les rebelles hors des villes et de leurs principaux bastions. Ces derniers mènent aujourd’hui des actions furtives de guérilla contre les forces de sécurité et les civils.