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Emigration

Au large de Mbour, au Sénégal, un nouveau naufrage fait des dizaines de victimes

Méditerranéedossier
La plupart des passagers de l’embarcation, qui a chaviré à quelques kilomètres de la côte, étaient originaires de cette ville de pêcheurs, tristement célèbre pour ses drames migratoires à répétition.
Les familles et proches des naufragés, en attente de nouvelles de la part des équipes de secours, à Mbour, le 9 septembre. (John Wessels /AFP)
publié le 11 septembre 2024 à 12h55

Au Sénégal, Mbour est synonyme de tragédie. La ville de pêcheurs, à 50 kilomètres au sud-est de Dakar, est le point de départ le plus connu des pirogues clandestines qui mettent le cap sur le territoire espagnol des îles Canaries, porte d’entrée vers l’Europe. Depuis des années, la jeunesse de Mbour embarque sur les bateaux de la mort à l’assaut de l’Atlantique. Le voyage, de 1 500 kilomètres soit environ une semaine en haute mer, est extrêmement périlleux. Dimanche 8 septembre, le naufrage a eu lieu au large de Mbour, à quelques kilomètres seulement de la côte. Trente-cinq corps ont été repêchés par la Marine sénégalaise. Des dizaines d’autres ont été engloutis par l’océan. Quelques rescapés ont tenu assez longtemps dans l’eau pour être secourus par des pêcheurs.

La plupart des passagers étaient originaires du même quartier populaire de Mbour. Selon la presse sénégalaise, le propriétaire de la pirogue était lui-même à bord au moment du drame, mais aurait réussi à nager jusqu’à la plage. Il se serait rendu à la police, reconnaissant avoir embarqué 88 passagers moyennant des sommes comprises entre 300 000 et 400 000 francs CFA (de 450 à 600 euros). Mais, des rescapés réfutent «catégoriquement» cette version, jurant que «la pirogue, pleine comme un œuf, avait à son bord plus de 200 passagers dont 5 femmes et un nombre important d’enfants».

Le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, «s’est incliné devant la mémoire des victimes du naufrage», a indiqué le communiqué de compte rendu du conseil des ministres, mardi. Le chef de l’Etat de 44 ans, élu sur un programme de rupture, très populaire chez les jeunes Sénégalais, avait symboliquement tenu le meeting de clôture de sa campagne électorale à Mbour, puis y était retourné après son élection triomphale, début mai. Le naufrage de dimanche est le premier drame migratoire de cette ampleur auquel il est confronté depuis le début de son mandat.

Plus de 22 000 Africains ont débarqué aux Canaries en 2024, soit plus du double par rapport à l’année précédente à ce stade de l’année. Fin août, le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, en tournée en Afrique de l’Ouest, avait annoncé la signature au Sénégal, en Gambie et en Mauritanie de nouveaux accords en faveur d’une «migration régulée». Ils sont censés mettre en place un cadre concerté d’entrée régulière sur le sol espagnol en fonction des besoins de main-d’œuvre. Lundi 9 septembre, la Marine sénégalaise a intercepté deux nouvelles pirogues transportant 421 migrants clandestins, dont 20 enfants, sans préciser le lieu de l’intervention, ni la nationalité des passagers.