Menu
Libération
Justice

Au Mali, les 46 soldats ivoiriens accusés d’un complot bidon condamnés à vingt ans de prison

Les membres de l’armée ivoirienne avaient été arrêtés en juillet à l’aéroport de Bamako, où ils venaient d’atterrir dans le cadre d’une relève d’une opération de soutien logistique à un contingent de Casques bleus.
A Abidjan, en septembre 2022, manifestation pour réclamer la libération des soldats ivoiriens détenus au Mali. (Diomande Ble Blonde/AP)
publié le 31 décembre 2022 à 11h46

De la farce à la tragédie. Les 46 militaires ivoiriens accusés par les autorités maliennes d’être des «mercenaires» depuis leur arrestation à l’aéroport de Bamako cet été, ont été condamnés vendredi à vingt ans de réclusion criminelle. Les chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) avaient pourtant donné jusqu’au 1er janvier à la junte malienne pour les libérer.

La justice malienne les a finalement déclarés coupables d’ «attentat et complot contre le gouvernement», «atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat», «détention, port et transport d’armes et de munitions de guerre […] ayant pour but de troubler l’ordre public par l’intimidation ou la terreur», selon le procureur général Ladji Sara, cité dans un communiqué. Les soldats avaient été arrêtés le 10 juillet, en uniforme, alors qu’ils débarquaient au Mali dans le cade d’une opération d’appui logistique pour un contingent de la Mission des Nations unies au Mali (Minusma), sans être eux-mêmes des Casques bleus. Dans ce dossier, l’ONU avait reconnu des «dysfonctionnements» dans une note adressée au gouvernement malien et admis que «certaines mesures n’ont pas été suivies». Abidjan, de son côté, assure que ses soldats étaient bien en mission pour la Minusma, et exige leur libération depuis le premier jour.

Mais Bamako les accuse d’avoir voyagé sous de fausses identités et avec des armes sans que les autorités n’aient été informées. La junte a érigé cette affaire en manifestation de la souveraineté dont elle dit avoir fait un principe cardinal vis-à-vis de la France, poussée vers la sortie, la Cédéao et même la Minusma.

Le 22 décembre, une visite à Bamako d’une délégation officielle ivoirienne s’était pourtant déroulée dans un esprit «fraternel», selon les participants. Elle s’est conclue par la signature d’un mémorandum, le ministre ivoirien de la Défense soulignant que l’affaire était «en voie de résolution». Le contenu des discussions concernant les militaires ivoiriens n’avait pas été rendu public, mais le ministre malien des Affaires étrangères Abdoulaye Diop a parlé devant la presse d’un «incident malheureux», tandis que le ministre ivoirien de la Défense a évoqué un «malentendu». Des termes bien éloignés de ceux de «prise d’otage» et «mercenaires» employés par les deux parties depuis plusieurs mois.

Malgré la condamnation sévère prononcée vendredi, l’accord trouvé entre le Mali et la Côte-d’Ivoire laisse ouverte la possibilité d’une grâce présidentielle du chef de la junte malienne, Assimi Goïta, qui doit s’exprimer samedi à l’occasion de ses vœux à la Nation.