Un journaliste rwandais l’avait un jour surnommé «l’homme au cœur d’or». Mort ce week-end à 61 ans, Damas Gisimba était bien plus : un héros national qui aura fait preuve d’un courage inouï pendant le génocide des Tutsis en 1994. Lorsque les massacres commencent en avril, cette année-là, il dirige un orphelinat crée par son père, dans le quartier populaire de Nyamirambo, à Kigali, la capitale. Très vite, l’établissement est submergé par l’arrivée de nombreuses familles tutsies qui cherchent à se cacher pour échapper aux militaires et aux milices interahamwe qui quadrillent la ville.
Pendant trois longs mois, Damas Gisimba va marchander, négocier, et même corrompre les tueurs qui se présentent au portail. Sans éviter des incursions qui se révéleront hélas parfois meurtrières. Dans ce climat de peur et de violences permanentes, alors que les expatriés et la majorité des Casques bleus présents dans le pays ont vite plié bagage, près de 400 personnes s’entassent dans le petit orphelinat, plus de 300 enfants mais aussi 80 adultes. Damas Gisimba apprend aux petits à se taire, à ne pas révéler que les adultes sont dissimulés sous les lits, dans les placards, les faux plafonds. Les extrémistes veulent s’attaquer aux enfants ? Il leur assure inlassablement qu’il ne connaît pas leur identité ethnique, prétend que ce sont tous des orphelins. Et leur laisse croire qu’il est «l’un des leurs». Du moins, en principe : un Hutu, appartenant à cette ethnie majoritaire au nom de l