Des étincelles dans la nuit d’Omdourman : depuis le toit de son immeuble, Madjid (1), 23 ans, jette un œil aux fugaces balles traçantes, au loin, qui font pâlir la pleine lune. Le jeune homme porte un tee-shirt camouflage. Il a rejoint les mustanfareen, ces civils qui prêtent main-forte à l’armée nationale dans la guerre qui l’oppose aux Forces de soutien rapide (RSF), une puissante unité paramilitaire dirigée par le général dissident Mohamed Hamdan Dagalo, dit «Hemetti».
Cela fait cinquante jours que Madjid s’entraîne avec un groupe de 80 volontaires. Exercices physiques, marches militaires, chants patriotiques, démontage et remontage de kalachnikovs… Il n’a «pas encore tiré», précise-t-il, mais cela ne saurait tarder. Il était étudiant en première année d’études de commerce quand la guerre a éclaté, le 15 avril 2023. Madjid s’est retrouvé coincé dans un quartier de Khartoum passé sous contrôle des RSF. «Des gens du voisinage ont été dénoncés pour avoir stocké des armes clandestinement en vue d’actions de résistance, raconte-t-il. Ils ont été torturés à mort, leurs corps jetés dans le Nil.»
Madjid a payé 70 000 livres soudanaises (120 euros) de pot-de-vin à un combattant RSF pour pouvoir s’échapper de Khartoum en bus et rejoindre Omdurman. Le trajet a pris trois jours. Les deux villes ne sont pourtant séparées que par la largeur du Nil, mais il est impossible de traverser la ligne de front. A son arrivée, Madjid s’est immédiatement engagé chez les