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Libération
Reportage

«C’est l’or qui appelle les gens» : la manne des mines autogérées de Haute-Guinée

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Réputée pour la richesse de son sous-sol, la région a attiré des dizaines de milliers d’orpailleurs. Leur activité est strictement encadrée par des institutions coutumières locales, hautement respectées.
A Kintinian, sur le site minier de Bekono, le 23 janvier 2024. Des femmes évacuent le minerai aurifère. (Célian Macé/Libération)
publié le 24 février 2024 à 9h19

L’or du Bouré semble inépuisable. On fouille pourtant sans relâche son sous-sol depuis des siècles. La commune de Kintinian, dans le nord-est de la Guinée, est aujourd’hui l’épicentre de cette zone minière. Son territoire est constellé de dizaines de milliers de puits, comblés, abandonnés, exploités ou fraîchement creusés. Chaque jour, on perce à nouveau cette terre, on ronge ses reliefs à la pioche, à la pelle mécanique, au marteau-piqueur. A la longue, les mines ont déformé et reformé le paysage. Une carrière géante, grande comme deux terrains de football, s’étend à une centaine de mètres au nord de la mairie de Kintinian. Ailleurs, des collines sont apparues, de vastes dépressions se sont creusées, le cours des rivières a été modifié, la forêt a disparu. Elle a aussi par endroits repoussé sur d’étranges tapis de bosses – traces d’anciennes exploitations.

Les historiens en débattent encore : la région du Bouré, dans la région contemporaine de Haute-Guinée, est-elle le mythique royaume du Wangara évoqué par le géographe arabe Al-Idrissi ? Il décrivit il y a près de mille ans «ce pays renommé à cause de la bonté et de la quantité de l’or qu’il produit»,«chacun ramasse la quantité d’or, grande ou petite, que Dieu lui a accordée, sans que personne soit entièrement privé du fruit de ses peines». Le Français René Caillié s’en approcha au cours de son voyage vers Tombouctou, en 1827 : «Tous les Mandingues de Cambaya s’accordent à dire que le pays de Bouré est