C’était un dimanche de juin, tard dans la soirée. L’averse, brève en cette fin de saison des pluies, avait cessé. Les toits s’égouttaient en notes éparses, une mélodie rassurante. Soudain, des coups de feu ont retenti dans l’obscurité, puis des cris : «Au voleur !» A chaque fois, les cœurs sursautent, mais la partition reste familière, ces derniers mois, à Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu.
Ce soir-là, Jean Rubenga, 25 ans, est de veille dans une propriété du quartier Himbi, au bord du lac Kivu. Chanteur, musicien, le jeune homme travaille aussi comme gardien, il compte sur ce maigre salaire pour subvenir à ses besoins et poursuivre sa passion. Il s’approche de la porte qui donne sur la rue, hausse la voix pour dissuader les présumés cambrioleurs. Un tir claque. La balle perce un des panneaux de tôle qui forment le mur d’enceinte. Elle atteint Jean à l’abdomen. Il saigne, perd connaissance. Des voisins le transportent à l’hôpital, des médecins tentent d’opérer, mais il est déjà trop tard. Il est déclaré mort peu après son arrivée.
Originaire de la ville de Saké, à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de Goma, Jean avait, comme des milliers d’autres, été poussé ici par la guerre. Il était connu au sein de la petite communauté de jeunes artistes et poètes de la ville. «Trois semaines sous terre. Que tu ne dis plus un mot. Trois semaines loin de la peur. Moi, dans le silence et les remords», écrit l’un d’eux dans un hommage sur les réseaux sociaux.
«Libération» ou «occupation»
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