De loin, la mine de Rubaya évoque une fourmilière humaine où s’activent, entre les sillons et les trous, des milliers de silhouettes. La tache ocre, au relief cabossé, s’étend à perte de vue, comme une plaie béante, au milieu des collines verdoyantes du Masisi, à une cinquantaine de kilomètres au nord-ouest de Goma. Armés de pelles et de pioches, les creuseurs, couverts de boue et de sueur, s’enfoncent dans des galeries fragiles, où l’oxygène se raréfie au fur et à mesure qu’ils descendent. A parfois plus de 30 mètres sous terre, ils s’échinent pour récolter des fragments de pierre grisâtre qu’ils remontent ensuite, en rampant, vers la surface : le coltan. Ce minerai convoité est un excellent conducteur, utilisé dans la fabrication des téléphones portables, ordinateurs et voitures électriques.
Les conditions de travail sont épouvantables, les accidents fréquents. Mi-juin, un glissement de terrain meurtrier a endeuillé Rubaya, où tout le monde, ou presque, vit grâce au coltan. Selon plusieurs sources locales, la coulée de boue aurait fait plus de 300 victimes. «J’étais avec mes collègues. Nous avions faim, alors ils m’ont envoyé acheter à manger, raconte Bonane Migaraku, un mineur artisanal qui travaille depuis quinze ans sur ce site. Sur le chemin du retour, j’ai aperçu un grand éboulement. Dans notre puits, nous étions trente, seuls quatre ont échappé au drame, tous les autres sont morts.»
Ses collègues à peine enterrés, Bonane est retourné creuser. Pas de temps