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Libération
Répression

En Tunisie, un homme condamné à mort pour des messages Facebook hostiles au président Kaïs Saïed

Le tribunal de Nabeul a prononcé mercredi 1er octobre la peine capitale contre un individu de 51 ans, mis en cause pour des publications dont le contenu précis n’a pas été révélé. Aucune exécution n’a été appliquée dans le pays ces dernières décennies.

L'accusé a été condamné à mort notamment en vertu du décret-loi 54 sur la diffusion de fausses informations, selon son avocat. (Nikolas Kokovlis /AFP)
Publié le 03/10/2025 à 17h29

On ne critique pas Kaïs Saïed. En Tunisie, un homme de 51 ans a été condamné à mort ce mercredi pour avoir partagé sur Facebook des publications accusées de porter atteinte au chef de l’Etat. C’est l’avocat de l’accusé, Me Oussama Bouthelja, qui a révélé la nouvelle, vendredi 3 octobre. «Le verdict de peine de mort a été rendu mercredi au tribunal de Nabeul», dans le nord de la Tunisie, «et les publications ont été considérées comme portant atteinte au président, à la ministre de la Justice et à la justice», a-t-il déclaré. Le contenu des publications incriminées demeure pour le moment inconnu.

Le Comité pour le respect des libertés et des droits de l’homme en Tunisie (CRLDHT) a dénoncé cette condamnation, la qualifiant de «précédent très grave» et de «bévue monumentale» à l’encontre d’un «père de trois enfants». Pour l’ONG, l’affaire «trahit l’état critique de la justice en Tunisie, où un certain magistrat, dans sa quête de la satisfaction du régime, n’hésite pas à commettre des ignominies aussi ridicules que graves». L’accusé, détenu depuis janvier 2024, a été condamné en vertu des articles 67 et 72 du Code pénal ainsi que du décret-loi 54 sur la diffusion de fausses informations, et «il a écopé de la peine maximale», selon son avocat. L’article 72 punit les actes «ayant pour but de changer la forme du gouvernement». Son avocat a annoncé son intention de faire appel.

Virage répressif

La justice tunisienne continue à prononcer régulièrement des sentences capitales, notamment dans des affaires de terrorisme. A la fin de l’année 2023, 136 condamnés à mort dormaient dans les geôles du pays, dont 49 condamnés sur la seule année 2022, selon les chiffres de l’ONG Ensemble contre la peine de mort (ECPM). Mais un moratoire est appliqué de fait et aucune exécution n’a eu lieu depuis 1991.

Le président, Kaïs Saïed, a engagé un virage répressif depuis qu’il s’est octroyé les pleins pouvoirs lors d’un coup de force en juillet 2021. Des dizaines d’opposants, avocats, de journalistes et de militants de l’aide aux migrants sont désormais emprisonnés, soit en vertu du décret 54, soit pour des motifs liés à la législation antiterroriste.